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rité continua à s’étendre sur plus de cent cinquante églises ou monastères répartis dans trente- sept diocèses d’Italie et de France, avec les droits de nomination à ces bénéfices, de correction, de visite et autres prérogatives des généraux d’ordre[1]. L’abbé de Saint-Michel ne dépendait d’aucun évêque et relevait directement du Saint-Siège. Il avait la juridiction épiscopale ordinaire et l’exerçait, à l’aide de vicaires généraux, sur tous les bénéfices dépendant de son abbaye ; il possédait aussi la juridiction civile et criminelle sur un territoire étendu dont le monastère était comme le chef-lieu.

La vaste association bénédictine n’avait point de chef unique comme l’institut cistercien. Elle était divisée en diverses congrégations, dont quelques-unes cherchaient à imiter la règle de cet institut par des réunions périodiques analogues aux chapitres généraux de Cîteaux. L’abbaye de la Cluse était le centre d’une de ces fractions de l’ordre bénédictin, et dom Antoine de Savoie avait le titre de général, chef d’ordre de Saint-Benoît, supérieur de la congrégation de Saint-Michel de la Cluse.

Trois ans avant sa mort (1685) dom Antoine avait encore été nommé doyen de la Sainte-Chapelle de Chambéry[2]

La plupart des abbayes qui le reconnaissaient pour chef avaient été possédées avant lui par d’autres membres de la Maison souveraine : le cardinal Maurice, Eugène-Maurice, neveu de ce dernier, et dom Gabriel. Aussi, Victor-Amédée II s’efforça de les conserver dans sa famille et présenta au Souverain Pontife, pour titulaires de tous ces bénéfices, le prince Eugène. Innocent XI répondit avec raison que les biens ecclésiastiques n’étaient point la récompense de la valeur militaire. Il finit cependant par concéder une partie de la demande et conféra les abbayes de la Cluse et de Caseneuve à ce jeune prince, qui devint ainsi abbé commendataire et presque évêque avant de porter l’épée de généralissime, de s’immortaliser par la délivrance de Turin et de devenir le premier capitaine de son siècle.

Résidant presque constamment à l’étranger, il abandonna la direction de l’abbaye de Saint-Michel à Ignace Carrocio, prévôt de l’église métropolitaine de Turin, qu’il revêtit des plus amples pouvoirs.

  1. Le diocèse de Toulouse renfermait près de soixante établissements religieux dépendant de cette abbaye. En Savoie, on en comptait dix, repartis dans les quatre diocèses de Genève, de Tarentaise, de Maurienne et de Grenoble
  2. Besson, p. 318.
    À tous ces titres ecclésiastiques, il ajoutait ceux de marquis de Rive, du nom de sa mère, et comte de Montanar. (Recueil des Bulles, etc. 1670 ; Archives du Sénat.)