Page:Hobbes - Œuvres philosophiques et politiques (trad. Sorbière), 1787.djvu/219

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la domination immédiate de celui qui le premier le tient en sa puissance. Or, est-il que l’enfant qui vient de naître est en la puissance de sa mère, avant qu’en celle d’aucun autre, de sorte qu’elle le peut élever ou l’exposer, ainsi que bon lui semble et sans qu’elle en soit responsable à personne.


III. Si donc elle l’élève, elle entend que c’est sous cette condition (car l’état de nature est un état de guerre) qu’étant devenu homme fait, il ne se rendra pas son ennemi, c’est-à-dire, qu’il demeurera dans l’obéissance. En effet, puisque c’est par une nécessité naturelle que nous nous portons à vouloir ce qui nous paraît être de notre bien et de notre utilité, on ne doit pas concevoir que quelqu’un ait donné la vie à un autre si absolument, que l’âge et les forces lui étant accrues, il puisse devenir ennemi de son protecteur sans commettre de perfidie. Or, je tiens pour ennemi celui qui n’obéit point à un autre auquel il n’a point droit de commander. Et de cette façon, en l’état de nature, une femme dès qu’elle est accouchée, acquiert le titre de mère et de maîtresse de son enfant. Ce qu’on peut alléguer en cet endroit, que cet honneur n’appartient pas à la mère, mais au père, qui mérite bien mieux la seigneurie à cause de l’excellence de son sexe, ne me semble pas d’assez forte considération ; car, au contraire, je trouve qu’il n’y a pas une telle disproportion entre les forces naturelles du mâle et de