Page:Houdar de La Motte - Œuvres complètes, 1754, tome 9.djvu/303

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Attendu que le miel n’en valoit rien du tout :
Enjoint à ses portiers de refuser la porte
À tout contrevenant que l’odeur trahiroit.
La défense est de droit étroit ;
Point de grace en aucune sorte.
Fait en notre louvre emmiélé,
Tel an, tel jour depuis notre séance au trône,
Et du grand sceau de cire jaune
Le tout scellé, contre-scellé.
Le peuple ainsi lié par la loi souveraine,
Choisissoit bien ses mets ; ne touchoit qu’au jasmin,
À l’œillet, à la marjolaine ;
Dînoit le plus souvent de roses et de thin.
Vous les eussiez vûs tous savourer les fleuretes
Dont les jardins sont parfumés ;
Puis dans leurs utiles retraites
Ils revenoient tout embaumés.
Un jour pourtant une abeille imprudente,
Favorite du prince et presque en droit d’errer,
Ayant fait son repas d’une mauvaise plante,
Se présente à la ruche, et l’on vient la flairer.
Vous ne sentez pas bon. Qu’importe que je sente ?
L’ordre n’est pas pour moi, dit la contrevenante.
Les portiers là-dessus la laisserent rentrer :
Mais le prince en faisant sa ronde,
Sentit l’odeur coupable ; il appelle son monde,
Sur son trône de cire il s’assied gravement ;
Il interroge, il pese ; et puis l’affaire instruite ;

Muscan condamne