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POST-SCRIPTUM DE MA VIE.

est le dindon transfiguré ; le cygne est le canard idéalisé ; le citoyen est le bourgeois sublimé.

1860.

Ô mystère ! croire ne dépend pas de l’esprit ; aimer ne dépend pas du cœur.

[1840-1844.]

L’esprit et le cœur sont deux soifs, la foi et l’amour sont deux fleuves. Vous avez soif ici, le fleuve coule là-bas, hélas ! Heureux qui peut s’agenouiller et prendre un peu de ces eaux divines dans le creux de sa main ! Bois si tu peux, bois où tu peux, pauvre âme !

[1840-1844.]

Sentir est une loi de la vie, savoir est un besoin de l’intelligence, comprendre est un désir de l’âme. Ô abîme de la destinée humaine ! la plupart ne comprennent pas Dieu ; beaucoup ne savent pas la nature ; quelques-uns même ne sentent pas l’amour. Le réel et incurable aveuglement n’est pas de ne point voir, c’est de ne point sentir. Malheur à qui a l’âme aveugle !

[1840-1844.]

Le cœur ne sait que ce qu’il sent.

[1840-1844.]

Hélas ! il n’y a de soleil dans le ciel que pour ceux qui ont de la joie dans le cœur. Quand le bonheur ne rayonne pas au dedans de nous, ce qui rayonne au dehors de nous n’est qu’une ironie.

[1838-1840.]

MILITARISME.
CONSIGNE. — ARMÉE. — OBÉISSANCE PASSIVE.

— Tu vois ce mur-là ?

— Oui, mon général.

— De quelle couleur est-il ?

— Blanc, mon général.

— Je te dis qu’il est noir. De quelle couleur est-il ?

— Noir, mon général.

— Tu es un bon soldat.

[1858-1859.]