Page:Hugo - La Légende des siècles, 1e série, édition Hetzel, 1859, tome 2.djvu/96

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» Fait croître au fond des rocs les arbres monstrueux !
» Ô forêt ! »

Le sylvain avait fermé les yeux ;
La flûte que, parmi des mouvements de fièvre,
Il prenait et quittait, importunait sa lèvre ;
Le faune la jeta sur le sacré sommet ;
Sa paupière était close, on eût dit qu’il dormait,
Mais ses cils roux laissaient passer de la lumière ;

Il poursuivit :

« Salut, Chaos ! gloire à la Terre !
» Le chaos est un dieu ; son geste est l’élément ;
» Et lui seul a ce nom sacré : Commencement.
» C’est lui qui, bien avant la naissance de l’heure,
» Surprit l’aube endormie au fond de sa demeure,
» Avant le premier jour et le premier moment ;
» C’est lui qui, formidable, appuya doucement
» La gueule de la nuit aux lèvres de l’aurore ;
» Et c’est de ce baiser qu’on vit l’étoile éclore.