Page:Hugo - Les Travailleurs de la mer Tome II (1892).djvu/229

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
219
LES DOUBLES FONDS DE L’OBSTACLE

crypte où le cailloutis de galets et la voûte de roche se rejoignaient, et où finissait le cul-de-sac.

Il y entra, et, penchant le front, se dirigea vers ce qu’il y avait au fond.

Quelque chose riait en effet.

C’était une tête de mort.

Il n’y avait pas que la tête, il y avait le squelette.

Un squelette humain était couché dans ce caveau.

Le regard d’un homme hardi, en de pareilles rencontres, veut savoir à quoi s’en tenir.

Gilliatt jeta les yeux autour de lui.

Il était entouré d’une multitude de crabes.

Cette multitude ne remuait pas. C’était l’aspect que présenterait une fourmilière morte. Tous ces crabes étaient inertes. Ils étaient vides.

Leurs groupes, semés çà et là, faisaient sur le pavé de galets qui encombrait le caveau des constellations difformes.

Gilliatt, l’œil fixé ailleurs, avait marché dessus sans s’en apercevoir.

À l’extrémité de la crypte où Gilliatt était parvenu, il y en avait une plus grande épaisseur. C’était un hérissement immobile d’antennes, de pattes et de mandibules. Des pinces ouvertes se tenaient toutes droites et ne se fermaient plus. Les boîtes osseuses ne bougeaient pas sous leur croûte d’épines ; quelques-unes retournées montraient leur creux livide. Cet entassement ressemblait à une mêlée d’assiégeants et avait l’enchevêtrement d’une broussaille.

C’est sous ce monceau qu’était le squelette.

On apercevait sous ce pêle-mêle de tentacules et d’écailles