Page:Huysmans - En menage - ed Fasquelle 1922.djvu/326

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à André que Cyprien lui avait souvent parlé de leur amitié, tendit franchement la main et demanda la permission de retourner pour l’instant dans la cuisine.

— Fais-nous vite à dîner, nous mourons de faim, reprit le peintre, et il lui offrit le poulet froid qu’elle examina longuement, avec alarme.

— J’ai bien peur qu’il ne soit dur, soupira-t-elle ; enfin, nous le verrons. Tiens, Cyprien, mets un couvert, le dîner est prêt ; deux minutes, et je vous sers.

— Veux-tu voir le local, en attendant la soupe ? proposa le peintre. Ici, comme tu vois, la salle à manger ; là, dit-il en appuyant sur la clanche d’une porte, la chambre à coucher.

André entra, débita les banalités usitées en pareil cas, ajouta, par exemple, que c’était crânement astiqué, et il avait raison, car les meubles de Cyprien qui traînaient jadis, l’air malheureux, dans une pièce, avec leurs jambes éclopées et leur ventre glacé de crasse, miroitaient aujourd’hui, tout pimpants, d’aplomb sur leurs pattes soigneusement calées par des bouchons.

— À table, brailla Mélie, tenant à deux mains une grande soupière.

Ils s’assirent, Cyprien à gauche de Mélie, et André à droite. Il y eut un instant de silence. André déplia sa serviette et regarda, recueilli, la table. Près des filets luisants des couverts et des lames claires des couteaux, les assiettes mettaient sur le blanc de craie de la nappe des ronds d’un blanc plus