Page:Huysmans - L'Oblat.djvu/91

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pas plus malin que cela ; je vous confesserai d’ailleurs que, sorti de cette spécialité de la flore pharmaceutique, mes connaissances en botanique ordinaire sont nulles.

— C’est à Dijon que vous avez découvert ces livres ?

— Pas du tout ; je reçois, ici, les catalogues de tous les libraires d’occasion de Paris, de la province, de la Belgique et je me livre à la chasse du bouquin ; — c’est d’ailleurs la seule chasse que je comprenne. — C’est très amusant ; dame, l’on rate souvent le gibier qu’on vise de si loin et qui est abattu sur place par d’autres chasseurs ; — mais le plaisir que l’on éprouve lorsqu’il arrive un paquet de volumes et que l’on en extrait les oiseaux que l’on guettait d’ici !

Au fond, si vous exceptez le monastère et le jardinage, quelle autre distraction voulez-vous que le Val des Saints nous donne ?

— C’est juste ; et c’est vous qui avez planté le long de ces allées, des roses de Noël ?

— Oui, j’ai songé à l’hiver. Avec son cèdre et ses pins, le jardin restait vert, en l’air, mais c’était sur le sol la mélancolie des terres en cirage et des feuilles mortes ; alors j’ai acheté à Dijon ce genre d’ellébore, qui a très bien réussi. En voici d’autres d’une espèce différente, avec leurs feuilles découpées en menottes dentelées d’enfants ; celles-là poussent dans des feuilles presque noires des fleurs vertes, ou plutôt elles ne poussent rien du tout car elles se meurent !

— On croirait, ma parole, que vous avez cherché à réunir une collection de poisons !

— Ma foi ! Si l’on ajoute aux euphorbes et aux ellébores, la morelle qui est là-bas et qui produit de fausses