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LES FOULES DE LOURDES

et alors, du haut des grandes orgues, au-dessus de la porte d’entrée, un cri rocailleux mais vibrant, explosant en une flamme, ébranlait l’église : Magnificat !


Et une troupe de montagnards soutenait ce cri lancé à toute volée sous les voûtes, avec le tonnerre de leurs voix de bronze. C’était d’une âpreté et d’une violence, mais c’était aussi d’une solennité jugulante, d’une gloire inouïe ! Jamais tempête plus majestueuse de louanges n’avait retenti en l’honneur de la Vierge et il semblait que, nulle part encore, l’on n’eût ainsi exprimé le triomphe d’allégresse du Magnificat, comme en ces Vêpres brûlantes de Lourdes !

La disgrâce de la piètre église disparaissait ; elle se brouillait d’ailleurs dans les nuées gris perle de ses flocons d’encens et tremblait dans le fouillis des rayons de soleil tombés des vitres et mêlés aux foyers de lumière électrique allumés dans les centaines d’ampoules de ses lustres. On pouvait se croire ailleurs et savourer, pour quelques minutes, le bienheureux oubli de la Laideur et la joie de voir enfin offrir à Notre-Dame un présent qui fût vraiment digne d’Elle.

Et je songe à tout ce qu’on pourrait amoureusement lui dispenser à Lourdes… des grand’messes célébrées, selon le mode grégorien, ainsi que le veut d’ailleurs le Motu proprio du Pape ; et des