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LES FOULES DE LOURDES

Padoue, saint Expédit représentés par des plâtres peints de la rue Saint-Sulpice, mais la pièce de résistance, le chef-d’œuvre est une statue en cire coloriée de sainte Philomène, couchée dans une boîte fermée par un pupitre vitré que l’on soulève pour y glisser des cartes de visite et des lettres !

Et, tandis qu’un peu ahuri je m’agenouille, des dames à traînes blanches font des entrées solennelles, par le côté cour et par le côté jardin, dans le chœur. Elles ont l’air d’être en scène et regardent d’ailleurs le public pour s’assurer qu’on les admire.

Ô ces « m’as-tu-vues » de la piété !

Ce n’est décidément pas l’endroit rafraîchissant que j’avais rêvé ; ce genre de nonnes n’incite pas à la prière et, une fois sorti, quand j’ai rejoint la route, je pense à un autre couvent bizarre où l’on ne rencontre plus de religieuses en costume, mais des femmes vaguement inquiètes, en habit de ville.

Ce couvent, situé à l’autre bout du pays, au pied d’un mont sec et nu qui semble avoir été fait avec des détritus d’ordures ménagères, accumulées, là, depuis des siècles, possède une singulière chapelle tendue d’andrinople rouge, semé de fleurs de lys jaunes et parée d’un assortiment de bondieuseries italiennes, sanglantes à la fois et aimables, telles que l’on en voit dans la montre d’un débit de la rue du Bac, à Paris.