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LES FOULES DE LOURDES

Il y avait jadis, dans ce lieu, un Christ de ce genre de fabrication qui remuait les yeux et hypnotisait, en les vidant, les bourses. L’évèque intervint et le supprima ; moi, j’ai toujours l’impression, quand j’entre dans cette boîte rouge qui tient du café-concert et du théâtre forain, de humer un fumet d’hérésie. On n’y célèbre, d’ailleurs, aucun office ; les religieuses — si religieuses il y a — sont des Passionistes, mais des Passionistes indépendantes, ne relevant d’aucune maison de cet Ordre.

Lourdes renferme, heureusement, des instituts plus sérieux : des Dominicaines nichées sur la hauteur, derrière la voie des trains ; des Carmélites en face de la grotte, de l’autre côté de la rivière, et les Clarisses sur le rebord de la cascade du Gave.

Je déambule doucement, regardant ces plantes plus expressives, plus odorantes que celles poussées dans les plaines, qui fleurissent tout le long de la route. Ici, les ellébores vertes sont énormes, les pulmonaires aux clochettes roses ou lilas, aux feuilles cailloutées de blanc sont deux fois aussi grandes que celles cultivées dans les régions du centre ; mais la somptuosité des teintes, c’est surtout sur les côtes des rocs qu’il la faut chercher. Il y a sur ce chemin des rochers qui sont éclaboussés comme d’une poudre d’argent, par des lichens ; d’autres sont fastueusement revêtus de mousses