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LES FOULES DE LOURDES

des pèlerins que l’on ne voit pas ; il semble que des étincelles sautées du fond d’un four ouvert et portées par le vent, voltigent dans les lacets de la colline, qui, lentement, s’embrasent ; et les bluettes gagnent du terrain, pétillent déjà dans les arbres derrière l’abside de la basilique et atteignent, peu à peu, en tournant, le parvis, avant de descendre sur la rampe de droite, dans une indescriptible cacophonie de « Laudate Mariam » de « Au ciel, au ciel ! » mêlés à des cantiques de langues étrangères, tous écrasés, pourtant, par la masse pesante des Ave.

Et voici la basilique qui s’illumine du haut en bas, qui se découpe en des lignes tricolores dans l’ombre et elle paraît plus étriquée, plus chétive encore, sur le fond de ces montagnes que les ténèbres, déchirées par des coups de lumière, agrandissent. La chaufferette ronde, à couvercle, le gueux posé sous ses pieds, le toit du Rosaire, brasille avec la ferblanterie de son dôme et ses oculi rouges. Maintenant, les deux rampes, sont en pleine combustion ; l’on monte sur l’une et l’on descend sur l’autre ; l’on dirait d’une roue de feu, couchée sur le flanc, à demi soulevée du sol, qui tourne, en crépitant, lançant, dans son mouvement giratoire, des gerbes d’étincelles. Les cierges qui grimpent se hâtent, semblent marcher, en poussant des cris de victoire, à l’assaut de la basilique ; et