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LES FOULES DE LOURDES

Cette Vestale en pantalon est donc aussi une Danaïde en culotte, car cette grotte est un puits de flammes sans fond ; de la province, de l’étranger, de toutes les parties du monde, chaque matin, les commandes affluent et il s’agit d’épuiser les provisions du jour, sous peine d’être débordé par les arrivées du lendemain ; et quoi que l’on fasse, les piles s’entassent ; ici l’on pourrait établir des chantiers de cierges comme on établit, autre part, des chantiers de bûches. Tous les habitants vendent des cierges ou plutôt de faux cierges, car en fait de cire produite par « la mère abeille » ils ne débitent, au mépris de tous les textes liturgiques, que des rouleaux de vieux suif traités à l’acide sulfurique pour les dégraisser et les durcir.

Mais ces subterfuges, nécessités par l’appât sans cesse accru des ventes, disparaissent dans l’éclat du brasier qui dévore, indifféremment, les paraffines et les cires et, à regarder ces haies de prières qui flambent, l’on se remémore la Symbolique du cierge, telle que la concevaient Pierre d’Esquilin et saint Ambroise.

Le cierge se compose de trois parties : de la cire qui est la chair très blanche de Jésus, de la mèche insérée dans cette cire qui est son âme très pure cachée sous l’enveloppe de son corps, du feu qui est l’emblème de sa divinité.

Le cierge est donc la figure du Christ ; dès lors,