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LEUR PAYS.

époque assez récente. Tout cela fait que le Maghreb regorge d’habitants ; Dieu seul pourrait en faire le dénombrement.

On voit, par ce qui précède, que le Maghreb [El-Acsa] forme, pour ainsi dire, une île, ou pays détaché de tout autre, et qu’il est entouré de mers et de montagnes. Ce pays a maintenant pour capitale la ville de Fez, demeure de ses rois. Il est traversé par l’Omm-Rebiâ, grand fleuve qui déborde tellement dans la saison des pluies qu’on ne saurait le traverser. La marée s’y fait sentir jusqu’à environ soixante-dix milles de son embouchure. Il prend sa source dans le Deren, d’où il jaillit par une grande ouverture, traverse la plaine du Maghreb et se jette dans l’Océan, auprès d’Azemmor.

La même chaîne de montagnes donne naissance à un autre fleuve qui coule vers le sud-est et passe auprès des villes du Derâ. Cette région abonde en dattiers ; elle est la seule qui produise l’indigo, et la seule où l’on possède l’art d’extraire cette substance de la plante qui la fournit. Les villes, ou plutôt bourgades, dont nous venons de faire mention, possèdent des plantations de dattiers et s’élèvent de l’autre côté du Deren, au pied de la montagne. Le fleuve, appelé le Derâ, passe auprès de bourgades et va se perdre dans les sables, au sud-est de Sous.

Le Molouïa, une des limites du Maghreb-el-Acsa, est un grand fleuve qui prend sa source dans les montagnes au midi de Téza et va se jeter dans la Mer-Romaine, auprès de Ghassaça[1], après avoir traversé le territoire appelé autrefois le pays des Miknaça, du nom de ses anciens habitants. De nos jours, cette région est occupée par d’autres peuples de la race des Zenata ; ils demeurent dans les bourgades qui s’étendent en amont, sur les deux bords du fleuve, et qui portent le nom d’Outat. A côté d’elles, ainsi que dans les autres parties du même pays, on rencontre plusieurs peuplades berbères dont la mieux connue est celle des Betalça, frères des Miknaça.

De la montagne qui donne naissance au Molouïa sort un autre

  1. Il est probable que l’auteur aura voulu écrire Djeraoua, ville située près de l’embouchure du Molouïa.
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