Page:Ibsen - Le Canard sauvage, Rosmersholm, trad. Prozor, 1893.djvu/168

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plus sûr. Et puis, il faut tirer contre le courant, vois-tu, pas avec le courant.

hedwige. — Et ils meurent alors, grand-père ?

ekdal. — Bon Dieu, oui ! qu’ils meurent, quand on tire juste. Allons, faut rentrer s’habiller. Hum, tu comprends, hum.

(Il entre chez lui.)
(Hedwige regarde la porte du salon, s’approche de l’étagère, se dresse sur la pointe des pieds, prends le pistolet et l’examine.)
(Gina rentre, venant du salon, le torchon et le houssoir à la main.)
(Hedwige pose le pistolet sur un rayon, vivement et sans se laisser surprendre.)

gina. — Faut pas fouiller dans les affaires de papa, Hedwige !

hedwige, s’éloignant de l’étagère. — Je voulais seulement épousseter un peu.

gina. — Va plutôt voir à la cuisine, si le café est chaud. Je veux aller prendre le plateau, pour descendre chez lui.

(Hedwige sort. Gina se met à ranger et à balayer. Un instant de silence. On ouvre avec hésitation la porte du palier. Hialmar Ekdal jette un regard dans la pièce. Il est en pardessus, sans chapeau, ni lavé ni peigné, les cheveux ébouriffés, les yeux fatigués et battus.)

gina, s’arrête et le regarde, son balai à la main. — Comment, c’est toi, Ekdal ! Tu rentres donc tout de même ?

hialmar, d’une voix sourde, en s’avançant. — Je rentre, pour disparaître à l’instant.