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LE COUP DE FOUDRE

au sujet d’un nœud à placer. Je n’y suis plus du tout : ma voix me fait l’effet d’une voix étrangère. Je ne cesse d’admirer la souplesse de la main qui claquait si bien l’heureuse gamine. J’en connaissais la douceur et la caresse, de cette main serrée par moi plus d’une fois ; mais, l’ayant vue à l’œuvre, je la sais à présent douée aussi de vigueur et de fermeté, la main grasse et potelée. Ses doigts renflés, sa paume charnue ont dans leur moelleux la force qu’il faut pour claquer à grand éclat des fesses qui se serrent, cinglées de haut, et les faire tressauter, palpitantes. À la fessée, à la bonne fessée qui tant animait les fesses d’une enfant, celles d’une grande jeune fille, une femme bientôt, seraient-elles moins sensibles, resteraient-elles inertes ? Les mots qu’elle a dits tout à l’heure me reviennent, ceux dont je n’avais pas compris le sens caché : « elle est encore bien jeune ». Qu’a-t-elle voulu dire ? Hélas ! hélas ! je ne comprends pas encore, je comprends de moins en moins.

Je suis honteuse maintenant de la pensée que j’ai eue un instant. C’est que je suis si enfant encore ! malgré mes dix-sept ans, si jeune de caractère ! Papa, maman m’appellent « la gosse ! »

Oui, j’en suis une. J’ai honte, j’ai honte. Je n’ose regarder Madame Mary dont pèse le regard sur mon visage qui rougit. Il doit être, mon visage de gosse, de la couleur des fesses de Renée, à la dernière claque.

Mais, après un moment de silence, madame Mary parle. Je lève les yeux, les siens me scrutent et descendent en moi. Sûrement, elle y lit à livre ouvert. Ils rient, ses yeux. C’est bien cela : c’est le rouge de mes