Page:Ivoi - Femmes et gosses héroïques.djvu/111

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s’agita dans son lit. Sa face noire s’épanouit ; ses regards vagues s’illuminèrent. Il cria :

— Anouma blanche, Anouma blanche ! Y a fête ! Grand couscouss !

Les mots s’expliquaient d’eux-mêmes. Ehr-Madou jugeait que l’artiste ressemblait, en blanc, à la chère image noire de l’épouse lointaine.

Touchée de cette tendresse… par procuration, la comédienne se voua aussitôt au rôle de consolatrice. Faire au malheureux l’aumône de sa présence lui parut insuffisant. Elle s’évertua à parler comme l’aurait pu faire la véritable Anouma. Elle consentit à répondre au nom de l’absente. Le soir, elle dévorait les relations d’explorateurs, s’assimilant la vie au continent noir, afin de donner au mourant l’illusion d’une amie de là-bas.

Le mal se fit son complice dans l’œuvre de pitié. Ehr-Madou, brûlé de fièvre, vivait une sorte de rêve, peuplé de souvenirs du sol natal et de visions de guerre. L’approche de l’artiste l’apaisait. Alors il balbutiait des phrases touchantes en leur naïveté, où il don-