Page:Ivoi - Femmes et gosses héroïques.djvu/121

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— Je pense comme vous, monsieur Carbin… Je l’excuse. Dame ! un fiancé avec un bras de moins… ; c’est tout naturel… Seulement, voyez-vous, elle aurait pu attendre que je sois plus fort… Un bras suffisait pour l’instant, on m’aurait amputé le cœur plus tard.

Louise-Marie se sent frissonner. Cette douleur qui s’exprime, elle la sent infinie, comme sa propre désespérance. Elle veut voir ce frère de souffrance. La toile ne joint pas exactement ; voici un jour qui lui permet de glisser un regard.

Oh ! c’est un lieutenant, comme André.

Un grand garçon, dont la manche droite retombe vide. Son visage porte encore les traces du terrible assaut subi. Il parle au vieillard, qui hoche la tête d’un air désolé.

— Et puis, monsieur Carbin… on a été au front, on sait regarder les barrages de fil de fer du destin, en face, comme les autres. Le temps estompe les souvenirs, mais il ne diminue pas la timidité. Et, désormais, je suis un timide.