Page:Jacob - Souvenirs d’un révolté.djvu/42

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ne passe qu’à 11 heures et tant de minutes.

Puis, après un moment de réflexion :

— Monsieur est voyageur ? me demanda-t-il.

— C’est un antikouér, lui répondit gravement l’ami de mon vendeur de quinquet, avant que j’eusse le temps de lui faire la même réponse.

Par hasard, il me restait encore une carte commerciale.

— Tenez, lui dis-je en la lui remettant. Voici mon adresse à Paris. Vous qui pérégrinez à travers les villages et chez les gens de toutes conditions, si parfois vous me procuriez des affaires, vous auriez votre commission.

— Mais volontiers, fit-il en la prenant.

Puis, après l’avoir lue :

— Comme vous le dites, je voyage beaucoup, et si je trouvais quelque affaire je vous enverrai un mot.

— Merci d’avance.

— Tu sais, môssieu achète les vieilles lampes, lui dit le paysan.

— Ah ! Les lampes à pompe ? Demanda le boucher.

— Toutes les vieilles lampes, qu’on te dit, lui répondit le cul-terreux avec animation.

Puis tout en rebourrant sa pipe :

— Na, môssieu s’y connaît, ajouta-t-il d’un air de lui dire : « De quoi te mêles-tu de discuter ! »

La sérénité de mon attitude, ainsi que les quelques paroles que je venais d’échanger avec le boucher avait ébranlé leur suspicion. Aussi profitai-je de l’expertise du souvenir de famille que l’hôtesse venait de m’apporter enfermé dans une petite boîte en carton, pour reconquérir tout mon prestige en les persuadant que j’étais réellement courtier-antiquaire.

Avec solennité je pris la boîte des mains de la propriétaire du fameux bijou, l’ouvris et en retirai délicatement une fausse améthyste figurant un hanneton en grandeur naturelle, peut-être un peu plus gros, dont les pattes étaient en cuivre jaune. Certes, en toute autre occasion, au premier examen, j’aurai haussé les épaules en jetant le symbole de la patience à tous les diables ; mais là, je me contins. Je sortis ma loupe de ma poche et doctement j’examinai ce culot de verre