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Page:Jean Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 10, 1866.djvu/117

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points, c’est afin de les entraîner, par la suite de son discours, à se montrer tout aussi zélés sous ce dernier rapport. « Je ne vous dis pas cela par manière de commandement (8) ». Voyez quelle complaisance il a sans cessa pour eux, comme il s’abstient d’être importun, et d’employer là violence ou la contrainte ; que dis-je ? ce double caractère est ici dans les paroles même : absence d’importunité et absence de contrainte. En effet, comme il les a continuellement exhortés, qu’il a beaucoup loué les Macédoniens, de peur que cela ne ressemble à de la contrainte, voici comment il s’exprime : « Je ne vous dis pas cela par manière de commandement, mais voulant, par le zèle des autres, éprouver aussi votre fonds sincère de charité (8) ». Non pas qu’il en, doute : car tel n’est pas ici le sens ; mais il veut mettre cette vertu en lumière, la prouver, et en même temps la fortifier. Si je vous parle ainsi, veut-il dire, c’est afin de vous exciter à la même ardeur ; et en faisant mention de leur zèle, je donne de l’éclat ; du lustre, un stimulant, à vos propres dispositions. Puis, de ce motif, il en vient à un plus puissant : car il ne néglige aucune manière de présenter son conseil : il met tout en œuvre, il emploie toutes les ressources du langage ; il les a d’abord exhortés en louant les autres : « Vous connaissez la grâce de Dieu qui a été adonnée dans les églises de Macédoine (1) » ; il les exhorte ensuite en les louant eux-mêmes : « Mais afin que vous excelliez en a tout, par votre parole et par votre science (7) ». En effet, il peut être plus cuisant d’être surpassé par soi-même que par autrui.
Il arrive ensuite à l’argument capital et définitif de son conseil : « Car vous connaissez i la grâce de Notre-Seigneur, par laquelle il « s’est appauvri pour nous, lui qui était riche, « afin que nous nous enrichissions par sa pauvreté (9) ». Pensez, leur veut-il dire, à cette faveur divine, réfléchissez-y, méditez-la ; ne la laissez point passer comme inaperçue, mais considérez-en la grandeur, l’importance et la dignité, et alors vous ne ménagerez rien de ce qui vous appartient. Notre-Seigneur s’est dépouillé de sa gloire, pour que vous vous enrichissiez, non par sa richesse, mais par sa pauvreté. Si vous ne croyez point que la pauvreté produise la richesse, pensez à votre Maître, et vous n’aurez plus de doute. Car s’il n’était pas devenu pauvre, vous ne seriez pas devenu riche. Chose étonnante pourtant, que la pauvreté ait enrichi la richesse ! C’est qu’ici, par le mot richesse, l’Écriture entend la science de la piété, la purification de nos péchés, la justice, la sanctification, et les biens innombrables que Dieu nous a procurés, et qu’il nous procurera plus tard. Or, tout cela nous est venu de sa pauvreté. Et en quoi consista cette pauvreté ? A se revêtir de notre chair, à se faire homme, à souffrir ce qu’il a souffert. Et cependant il ne vous devait pas ces sacrifices, au lieu que vous, vous lui êtes redevable. « Et je vous donne en cela un avis pour votre utilité (10) ». Voyez comme ici encore il se préoccupe de n’être pas importun, et comme il adoucit son discours par ces deux expressions : « Je vous donne un avis », et « Pour votre utilité ». Il leur dit : Je ne vous contrains pas, je ne vous violente point, je fais un appel à votre bonne volonté et en vous parlant ainsi, j’ai moins en vue l’intérêt de ceux qui recevront que votre propre avantage.
Puis, l’exemple même qu’il donne, il le tire d’eux-mêmes, et non pas de quelques autres. « À vous qui avez déjà commencé, non seulement à faire celte bonne œuvre, mais même à la vouloir dès l’année dernière (10) ». Voyez comme il fait voir qu’ils s’y sont portés d’eux-mêmes et sans impulsion étrangère. C’est qu’ayant précédemment rendu ce témoignage aux habitants de Thessalonique, qu’ils avaient pratiqué l’aumône de leur propre mouvement, et avec beaucoup d’instance, il veut montrer que ce mérite est aussi celui dés Corinthiens. Voilà pourquoi il dit : « Non-seulement à faire cette bonne œuvre, mais même à la vouloir », et pourquoi aussi, non content de ces simples mots : Vous avez commencé, il emploie ceux-ci : « Vous avez déjà commencé dès l’année dernière ». Ainsi, ce à quoi je vous exhorte, c’est une chose dans laquelle vous m’avez déjà prévenu, en vous y excitant vous-mêmes avec la plus grande ardeur. « Et maintenant vous en avez accompli l’exécution (11) ». Il ne dit pas : « Vous avez fait cette bonne œuvre », mais : « Vous y avez mis la dernière main ». – « De manière que comme votre désir est provenu de votre vouloir, ainsi votre action est provenue de votre avoir (11) ». En effet, il ne faut pas que ce noble mérite se borne au désir, il faut qu’il reçoive la récompense qui suit les actions ;