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Page:Jean Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 10, 1866.djvu/15

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fondent sur nous ; mais, « de même qu’elles abondent », voulant ainsi montrer, que les apôtres endurent non seulement les mêmes souffrances que le Sauveur, mais de plus nombreuses encore. Nous n’avons pas seulement à souffrir ce qu’il a souffert ; mais nous souffrons beaucoup plus qu’il n’a souffert lui-même. Voyez en effet : le Christ a été tourmenté, persécuté, battu de verges, il est mort. Eh bien ! nous souffrons davantage encore ; et c’en serait assez pour nous consoler. On ne saurait taxer l’apôtre d’arrogance ou de témérité. Écoutez ce qu’il dit ailleurs : « Maintenant je me réjouis de mes souffrances ; et j’accomplis dans ma chair ce qui manque aux souffrances de Jésus-Christ ». (Col. 1,4) Oui, l’apôtre peut tenir ce langage sans arrogance ni témérité. Les disciples n’ont-ils point fait des miracles plus grands que ceux du Sauveur lui-même ? « Celui qui croit en moi, fera des miracles plus étonnants que ceux-ci ». (Jn. 14,12) Mais toute la gloire en revient à Jésus-Christ, qui agit dans ses serviteurs. Toute la gloire de leurs souffrances revient pareillement au Sauveur, qui les console, et qui leur donne la force de supporter avec courage les maux qui viennent fondre sur eux.
4. Aussi l’apôtre adoucit-il sur-le-champ ce qu’il vient de dire, et il ajoute : « De même la consolation abonde par Jésus-Christ ». C’est à Jésus-Christ qu’il rapporte toutes choses, et il aime à publier la bonté du Sauveur. Il ne dit pas : La consolation égale les souffrances ; mais bien : « La consolation abonde » ; en sorte que le temps de la lutte est aussi le temps des nouveaux triomphes. Quoi de plus grand, quoi de plus glorieux que d’être battu de verges pour Jésus-Christ, que de s’entretenir avec Dieu, que d’être assez fort pour résister toujours, que de vaincre les persécuteurs, que de ne pouvoir être dompté par l’univers entier, que d’attendre des biens que l’œil n’a point vus, que l’oreille n’a pas entendus, que le cœur de l’homme ne peut comprendre ? Est-il rien de comparable à ces souffrances endurées pour, la religion, à ces innombrables consolations qui nous viennent du Seigneur, à ce pardon qui nous délivre de péchés si multipliés et si graves ; à cette justice et à cette sainteté dont le Saint-Esprit orne les cœurs, à cette assurance, à ce courage en face de l’ennemi, à cette gloire dont l’éclat brille au sein même du danger ? Ne nous laissons donc point abattre, quand l’affliction vient nous éprouver. On ne peut vivre dans les délices, on ne peut s’endormir dans la mollesse, et demeurer uni au Sauveur. Pour s’approcher de Jésus, il faut secouer toute indolence, passer par l’épreuve des afflictions, entrer résolument dans la voie étroite. C’est le chemin qu’il a suivi lui-même. Ne disait-il pas : « Le Fils de l’homme n’a pas où reposer sa tête ? »
Ne vous plaignez donc pas d’être affligés ; songez que vous êtes dans la société de Jésus, que par l’affliction vous effacez vos crimes et vous vous acquérez de grands mérites. Ce qu’il faut craindre, ce qu’il faut redouter, c’est d’offenser le Seigneur. Cela excepté, ni l’affliction, ni les attaques de l’ennemi ne sauraient attrister une âme vraiment sage. Que dis-je ? Si vous jetez une étincelle dans l’Océan, n’est-elle pas éteinte aussitôt ? Ainsi en est-il de la souffrance ; fût-elle excessive, quand elle rencontre une conscience pure, elle se dissipe et s’évanouit sur-le-champ. C’est pourquoi saint Paul ne cessait de se réjouir, parce qu’il avait confiance en Dieu ; et il n’avait pas même le sentiment de si cruelles épreuves. Il était homme et il souffrait, mais sans se laisser abattre. Abraham n’était-il pas joyeux aussi, malgré les douleurs auxquelles il était en proie ? Exilé, condamné à de longs et pénibles voyages, il n’a pas où mettre le pied sur la terre étrangère. La famine sévit dans le pays de Chanaan et le force à passer en Égypte. Alors on lui enlève son épouse ; il court risque d’être tué. Ajoutez à tous ces maux la stérilité de Sara, les guerres qu’il est obligé de soutenir, les dangers qui l’environnent, et cet ordre qui lui enjoint d’immoler son Fils unique, cet Isaac qu’il aime si tendrement et dont la mort doit lui causer d’indicibles, d’irrémédiables douleurs. Il obéit promptement, il est vrai ; mais ne croyez pas qu’il ait supporté tant de maux, sans éprouver de souffrances. Quelque parfaite que fût sa justice, il était homme, et, comme tel, sensible à la douleur. Rien cependant ne put le décourager ; mais il soutint la lutte avec générosité, et chacun de ces combats fut suivi d’une victoire.
De même aussi le bienheureux apôtre qui chaque jour voyait fondre sur lui les afflictions, semblait goûter les délices du paradis ; il était heureux, il tressaillait de joie. Au sein