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Page:Jean Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 10, 1866.djvu/188

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idées était, si vous êtes déchus, nous ne le sommes pas, nous ; ce n’est pas ainsi que Paul s’exprime ; il ne veut pas les frapper durement ; il s’enveloppe d’obscurité ; il ne veut ni découvrir au grand jour sa pensée, en disant, vous êtes déchus ; ni procéder par interrogation, en disant : seriez-vous déchus ? il glisse tout en indiquant sa pensée d’une manière obscure : « Mais j’espère que vous reconnaîtrez que nous, nous ne sommes pas déchus ». Il y a encore ici une menace sévère, un accent terrible. Puisque vous tenez maintenant, dit-il, à ce que le châtiment exercé contre vous, vous serve de preuve, nous ne serons pas embarrassés pour vous faire la démonstration. Mais l’apôtre s’exprime avec plus d’autorité et d’une manière plus menaçante : « Mais j’espère que vous reconnaîtrez que nous, nous ne sommes pas déchus ». Vous ne devriez pas, dit-il, avoir besoin de cette expérience pour savoir ce que nous sommes, pour savoir que nous portons le Christ parlant et agissant en nous ; mais puisque vous tenez à faire une expérience par lw réalité des faits, vous apprendrez que nous ne sommes pas déchus. Ensuite, quand il a bien proféré la menace, montré que le châtiment est à leurs portes, quand il les a réduits à trembler, à attendre la punition, voyez-le, suivant un autre sentiment, adoucir son discours, tempérer la crainte ; montrer combien il est éloigné d’ambition, plein de sollicitude pour ses disciples, sage, élevé d’esprit et de cœur, étranger à la vaine gloire. Ce sont là toutes les qualités qu’il fait paraître, dans les paroles qu’il ajoute : « Je prie Dieu, que vous ne commettiez aucun mal, et non pas que nous soyons considérés ; que vous fassiez ce qui est de votre devoir, quand même nous devrions paraître déchus de ce que nous sommes. Car nous ne pouvons rien contre la vérité, mais seulement pour la vérité. Et nous nous réjouissons, lorsqu’il arrive que nous sommes faibles, et que vous êtes forts. Car nous prions afin que vous soyez parfaits (7, 8, 9) ».
Où trouver une âme qui égale cette âme ? On le méprisait, on l’abreuvait d’outrages, on lui prodiguait les moqueries, les railleries, on le traitait de personnage vil, misérable, de fanfaron, d’homme superbe dans ses paroles, mais incapable de rien produire, dans la réalité, qui fût de nature à montrer tant soit peu sa force à lui ; eh bien, non seulement il diffère de punir, non seulement il éprouve de la répugnance à frapper, mais il prie pour n’être pas réduit à cette nécessité. « Je prie Dieu », dit-il, « que vous ne commettiez aucun mal, et non pas que nous soyons considérés ; que vous fassiez votre devoir, quand même nous devrions paraître déchus de ce que nous sommes ». Que veut-il dire ? Je conjure Dieu, dit-il, je le supplie pour que je ne trouve personne d’incorrigible, personne qui soit incapable de repentir ; ou plutôt, je ne lui demande pas cela seulement, mais qu’il n’y ait pas même en vous un commencement de péché : « Afin que vous ne commettiez », dit-il, « aucun mal » ; afin que, si vous tombez dans le péché, vous vous bâtiez de vous repentir, de vous corriger, de désarmer la colère. Et ce que je désire de toute mon âme, ce n’est pas que nous soyons considérés, c’est tout le contraire, c’est que notre gloire, à nous, ne se montre pas. Car si vous vous obstinez, si votre repentir ne suit pas vos péchés, nous sommes dans la nécessité de vous châtier, de vous punir, de frapper vos corps : ce qui s’est fait pour Sapphira et pour le magicien, nous avons prouvé alors notre force et notre puissance. Mais ce n’est pas là que vont nos prières, bien au contraire, nous ne voulons pas que notre gloire se montre ; c’est-à-dire, nous ne voulons pas prouver la puissance qui est en nous, par votre châtiment, par la punition de pécheurs atteints de maladie incurable, mais que voulons-nous ? « Que vous fassiez ce qui est bien » ; voilà ce que demandent nos prières, que vous soyez toujours vertueux, toujours sans reproche, et que nous soyons comme sans gloire, n’ayant pas à montrer notre puissance pour punir. Et il ne dit pas, sans gloire : car il ne devait pas être sans gloire, en supposant même qu’il n’eût pas châtié ; il était, par cela même, couvert de gloire ; s’il en est qui soupçonnent, dit-il, qu’en ne montrant pas notre force nous nous rendons méprisables, abjects, peu nous importe cette opinion. Mieux vaut pour nous de passer pour tels auprès de ces personnes que d’être forcés, en frappant des coups sévères, en punissant des incorrigibles, de manifester la puissance que Dieu nous a donnée. « Car nous ne pouvons rien contre la vérité, mais seulement pour la vérité ». Il prouve, par ces paroles, que ce n’est pas uniquement