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Page:Jean Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 10, 1866.djvu/200

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Car telle était cette sainte âme ; elle embrassait l’univers entier, elle portait tout le monde avec elle, estimant comme la plus précieuse parenté celle qui est selon Dieu ; il les aimait tous comme s’il les eût enfantés ; bien plus, jamais amour paternel n’égala le sien. Telle est en effet la grâce de l’Esprit ; elle fait sentir des douleurs plus vives que celles de l’enfantement charnel, et manifeste un amour bien plus ardent. On peut le remarquer surtout dans l’âme de Paul : la charité semble lui donner des ailes, il est continuellement en mouvement, il ne s’arrête, il ne se fixe nulle part. Ayant appris que le Christ avait dit : « Pierre ; m’aimes-tu ? Pais mes brebis » (Jn. 21,15), et avait fixé là le terme extrême de l’amour, il a donné de cet amour des preuves prodigieuses. Imitons donc son zèle : Si nous ne pouvons convertir l’univers, des villes, des nations entières, qu’au moins chacun règle sa maison, sa femme, ses enfants, ses amis, ses voisins. Et que l’on ne dise pas : Je suis sans expérience et sans instruction. Personne n’était plus ignorant que Pierre, ni plus expérimenté que Paul. C’est lui-même qui l’avoue, et sans rougir « À la vérité, je suis inhabile pour la parole, mais non pour la science ». (2Cor. 11,6) Et pourtant cet ignorant et cet inhabile ont vaincu des milliers de philosophes, ont fermé la bouche à une foule de rhéteurs, uniquement en vertu de leur zèle et de la grâce de Dieu. Quelle excuse aurons-nous donc, nous qui ne pouvons pas même suffire à vingt personnes, qui ne sommes pas même utiles aux membres de notre famille ? Ce sont là d’inutiles objections et de vains prétextes : ce n’est pas le défaut de science ou d’habileté qui empêche d’instruire, mais la paresse et le sommeil de l’indifférence. Secouons donc ce sommeil, exerçons tout notre zèle sur les membres de notre maison, afin qu’après les avoir solidement établis dans la crainte de Dieu, nous jouissions ici-bas d’un repos parfait et que nous méritions les biens innombrables de l’autre vie, par la grâce et la bonté de Notre-Seigneur Jésus-Christ, par qui et en qui la gloire soit rendue au Père et en même temps au Saint-Esprit ; maintenant et toujours, et dans les siècles des siècles. Ainsi soit-il.