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Page:Jean Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 10, 1866.djvu/234

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parle de la circoncision, dans la confiance que personne n’osera plus la soutenir, et il dit « A la vérité la circoncision est utile si tu observes la loi ». Il avait pourtant un autre moyen de la rejeter ; il pouvait dire : Qu’est-ce que la circoncision ? Est-elle un mérite pour celui qui l’a reçue ? est-elle une preuve de bonne volonté ? On la donne avant l’âge de raison ; ceux qui étaient dans le désert, sont restés longtemps incirconcis ; on voit d’ailleurs en plus d’un endroit qu’elle n’est pas très-nécessaire. Ce n’est cependant point par ce côté qu’il la rejette, mais par où il fallait surtout l’attaquer, par Abraham. C’était là le plus beau triomphe, de la montrer méprisable là où elle leur paraissait respectable. Il aurait pu dire que les prophètes ont souvent appelé les Juifs incirconcis, mais c’étaient là la faute de ceux qui la recevaient et non celle de la circoncision elle-même. La question était de prouver qu’elle était sans vertu dans une vie parfaite, et c’est ce qu’il va faire. Jusqu’ici il n’a point parlé du patriarche, mais après avoir d’abord déconsidéré la circoncision par d’autres motifs, il porte plus tard son attention sur Abraham, à l’occasion de la foi, et dit : « Quand la foi a-t-elle été imputée à Abraham ? Dans la circoncision, ou avant la circoncision ? » (Rom. 4,10)
Tant que la circoncision combat le païen et l’incirconcis, il ne veut pas tenir ce langage, pour ne pas blesser trop vivement ; mais quand elle est opposée à la foi, alors il l’attaque résolument. En attendant, la lutte est contre l’incirconcision ; c’est pourquoi il est moins vif et dit : « A la vérité la circoncision est utile, si tu observes la loi ; mais si tu la violes, la circoncision devient incirconcision (18, 25) ». Il suppose ici deux circoncisions et deux incirconcisions, comme il y a deux lois. Car il y a la loi naturelle et la loi civile, et un intermédiaire entre elles, la loi dans les, œuvres. Et voyez comme il indique et met en avant ces trois lois. « En effet. », dit-il, « quand les Gentils qui n’ont pas la loi » : De quelle loi s’agit-il ? de la loi écrite. « Font naturellement ce qui est selon la loi ». Selon quelle loi ? selon la loi parles œuvres. « N’ayant pas la loi ». Laquelle ? la loi écrite. « Ils sont à eux-mêmes la loi ». Comment cela ? en suivant la loi naturelle. « Montrant ainsi l’œuvre de la loi » : De quelle loi ? de la loi par les couvres. La loi écrite est extérieure, la loi naturelle est intérieure ; mais la troisième est dans les actes. Ainsi l’une est exprimée par l’Écriture, l’autre par la nature, et la troisième par les œuvres. C’est cette dernière qui est nécessaire, puisque c’est pour elle qu’existent les deux autres, la loi écrite et la loi naturelle ; et sans elle, celles-ci sont inutiles et même très-nuisibles. Et c’est ce que l’apôtre indique en parlant de la loi naturelle : « En jugeant autrui, tu te condamnes toi-même » ; puis de la loi écrite : « Toi qui prêches de ne point dérober, tu dérobes ? » De même il y a deux incirconcisions, l’une de la nature et l’autre des œuvres ; et deux circoncisions : l’une dans la chair et l’autre dans la volonté. Par exemple, quelqu’un est circoncis le huitième jour, voilà la circoncision de la chair ; quelqu’un accomplit toutes les prescriptions légales, voilà la circoncision, du cœur, celle que Paul demande surtout, aussi bien que la loi elle-même.
3. Voyez donc comme après l’avoir d’abord admise en parole, il la supprime en effet. Il ne dit point : la circoncision est superflue, inutile, stérile ; que dit-il donc ? « À la vérité la circoncision est utile si tu observes la loi ». Il l’avait admise, en disant : J’en conviens, je ne dis pas le contraire, la circoncision est bonne ; mais quand ? quand elle est jointe à l’observation de la loi. « Mais si tu la violes, ta circoncision devient incirconcision ». Il ne dit pas : Elle est inutile, pour ne pas avoir l’air de la déshonorer ; mais en en dépouillant le Juif, il l’attaque par le fait. L’injure alors ne s’adresse plus à la circoncision, mais à celui qui l’a perdue par sa lâcheté. Paul agit dans cette circonstance comme les juges qui privent d’abord de leurs honneurs et punissent ensuite les hommes constitués en dignités, lorsqu’ils sont convaincus de quelques grands méfaits. Car après avoir dit : « Si tu la violes », il ajoute : « La circoncision devient incirconcision » ; et après avoir déclaré le Juif incirconcis, il n’hésite plus à le condamner. « Si donc l’incirconcis garde les préceptes de la loi, son incirconcision ne devient-elle pas circoncision (26) ? »
Voyez ce qu’il fait : il ne dit point que l’incirconcision l’emporte sur la circoncision : ce langage eût vivement déplu à ses auditeurs, mais il dit que l’incirconcision devient circoncision. Ensuite il demande ce que c’est que la circoncision, ce que c’est que l’incirconcision ;