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Page:Jean Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 10, 1866.djvu/269

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elle nous a délivrés du châtiment, mais elle nous a procuré la rémission des péchés et la vie, et tant d’autres avantages dont nous avons souvent parlé ; absolument comme si quelqu’un, non content de débarrasser un fiévreux de sa maladie, le rétablissait encore dans la fleur de l’âge, de la force et dès honneurs, ou comme si quelqu’un, non seulement donnait à manger à un affamé ; mais encore le comblait de richesse : et l’élevait au pouvoir suprême. Et comment, direz-vous, le péché a-t-il abondé ? La loi renfermait des préceptes sans nombre ; et comme il les ont tous violés, le péché a abondé. Voyez-vous quelle distance sépare la grâce de la loi ? Celle-ci fut une aggravation de condamnation ; celle-là est une surabondance de dons.
4. Après avoir parlé de l’ineffable amour de Dieu pour nous, il cherche le principe et la racine de la mort et de la vie. Quelle est la racine de la mort ? Le péché. C’est pour cela qu’il dit : « Afin que, comme le péché à régné par la mort, ainsi la grâce règne par la justice pour la vie éternelle par Jésus-Christ Notre-Seigneur (21) ». Il parle ainsi pour faire voir que le péché exerçait en quelque sorte le rôle de souverain, et que la, mort se tenait à ses ordres comme un soldat armé de par lui. Or, si le péché, armé la mort, il est clair que la justice qui efface le péché et qui est produite par la grâce, non seulement désarme la mort, mais la détruit ; et anéantit son empire, en ce que le sien est plus grand, elle qui a été introduite, non par un homme ni par le démon, mais par Dieu et par la grâce, qui dirige notre vie vers une fin meilleure et des biens infinis, et qui enfin, pour dire davantage encore ; n’aura pas de terme. La mort nous avait chassés de la vie présente : la grâce survenant ne nous l’a point rendue, mais nous en a donné une immortelle et éternelle, et le Christ est l’auteur. Ne doutez donc pas de la vie, puisque vous avez la justice : car la justice est plus grande que la vie, puisqu’elle en est la mère.
« Que dirons-nous donc ? Demeurerons-nous dans le péché pour que la grâce abonde ? A Dieu ne plaise. (6,12) Il revient ici à un sujet moral, sans dessein prémédité, pour lie pas paraître à charge et fatigant à un grand nombre, mais comme à une conséquence du dogme. S’il varie ainsi ses sujets pour les ménager, pour ne pas les irriter ; (c’était ce qui lui faisait dire : « Cependant j’ai écrit ceci avec quelque hardiesse » (Rom. 15,15), c’est qu’il leur eût semblé bien plus dur saris cette précaution. Après leur avoir donc fait voir la puissance de la grâce en ce qu’elle remet de grands péchés, il semblait avoir fourni aux insensés un motif pour pécher. En effet, ils auraient pu se dire : Si la gravité de nos péchés fait paraître la grâce plus grande, continuons à pécher afin que sa puissance éclate encore mieux. Pour empêcher qu’on ne parle ou qu’on ne pense ainsi, voyez comme il détruit l’objection, d’abord par cette négation : « A Dieu ne plaise ! » expression qui s’applique ordinairement aux choses évidemment absurdes ; ensuite en faisant un raisonnement auquel il n’a rien à répondre. Quel est-il ? « Nous qui sommes morts au péché, comment y vivons-nous encore ? » Que signifient ces mots : « Nous sommes morts ? » Ou que nous avions reçu notre arrêt, autant que, cela dépendait du péché ; ou que, croyants et éclairés, nous sommes morts pour lui : ce dernier sens paraît préférable, comme la suite le fait voir. Et qu’est-ce que c’est qu’être mort au péché ? C’est ne lui obéir en rien désormais, c’est ce que le baptême a, fait une fois : il nous a fait mourir au péché ; mais il faut que notre zèle nous maintienne toujours dans cet état, en sorte que, quand le péché nous commanderait mille choses nous n’en exécuterions aucune, mais que nous demeurions immobiles comme un mort.
Du reste, ailleurs il dit que c’est le péché qui est mort, mais son but est alors de prouver que la vertu est facile ; ici, afin d’éveiller l’auditeur, c’est lui qu’il veut faire mourir. Puis comme ses paroles étaient obscures, il les explique avec plus de vivacité. « Ignorez-vous, mes frères », leur dit-il, « que nous qui avons été baptisés dans le Christ, nous avons été baptisés en sa mort ? Car nous avons été ensevelis avec lui par le baptême pour mourir (3, 4) ». Qu’est-ce que cela veut dire : « Nous avons été baptisés en sa mort ? » Pour mourir comme il est mort lui-même : car le baptême est une croix. Ainsi ce que la croix et le sépulcre ont été pour le. Christ, le baptême l’est pour nous ; quoique d’une manière différente ; car le Christ est mort et a été enseveli dans sa chair, et nous devons être l’un et l’autre pour le péché, aussi. Paul ne dit-il point : « Entés » sur sa mort, mais « En la