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Page:Jean Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 10, 1866.djvu/270

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ressemblance de sa mort (5) ». En effet il y a mort ici et là, quoique sur des sujets différents : pour le Christ, mort dans sa chair ; pour nous morts au péché ; mais celle-ci vraie comme celle-là ; néanmoins nous devons donner quelque chose de notre côté : aussi ajoute-t-il : « Afin que, comme le Christ est ressuscité des morts par la gloire du Père, nous aussi nous marchions dans une nouveauté de vie ».
Ici, en parlant d’une vie régulière, il insinue le dogme de la résurrection. Comment cela ? Vous croyez, dit-il, que le Christ est mort et ressuscité ; croyez donc aussi pour ce qui vous regarde : car il doit y avoir entre Jésus-Christ et vous une entière ressemblance aussi bien dans la résurrection et dans la vie, que dans la croix et dans la sépulture. Si vous avez participé à la mort et à la sépulture, à bien plus forte raison aurez-vous part à la résurrection et à la vie : la question principale, celle du péché, étant résolue, il n’y a plus de doutes à élever sur la question secondaire, celle de la destruction de la mort. Mais Paul abandonne cela pour le moment aux réflexions et à la conscience de ses auditeurs ; pour lui, en présence de la résurrection future, il en demande de nous une autre : une nouvelle vie en ce monde, par le changement de nos mœurs. Quand l’impudique devient chaste, l’avare généreux, le violent pacifique : alors il y a résurrection, prélude de la résurrection future. Et comment y a-t-il résurrection ? En ce que le péché est mort, la justice ressuscitée, l’ancienne vie anéantie, la nouvelle vie, la vie des anges, en vigueur. Sous cette expression de vie nouvelle, il y a bien des changements, bien des conversions à chercher.
5. Pour moi je fonds en larmes et j’éclate en gémissements, quand je pense à la sagesse que Paul exige de nous, et à la lâcheté à laquelle nous nous abandonnons, revenant au vieil homme après, le baptême, retournant du côté de l’Égypte, nous rappelant les oignons après avoir mangé la manne. Dix jours, vingt jours après le baptême, nous voilà changés, nous revenons au passé. Ce n’est pas pendant un nombre de jours limités, même, pendant la vie et entière, que Paul exige de nous la régularité, et nous revenons à nos vomissements ; après avoir été rajeunis par la grâce, nous redevenons vieillards par l’effet du péché. Car l’amour des richesses, le joug des passions déréglées, en un mot toute espèce de péché vieillit ordinairement celui qui le commet ; or de l’âge avancé, de la, vieillesse à la mort, il n’y a qu’un pas. Car, aucun corps miné par le temps, non, aucun, ne saurait offrir l’image d’une âme corrompue, accablée par la multitude de ses péchés. Du reste elle est amenée au dernier degré de l’idiotisme, ne disant plus que des choses insignifiantes, à la manière des vieillards et des personnes en délire ; sujette à la pituite, à la stupidité, à l’oubli, à la chassie, odieuse aux hommes, facile à vaincre pour le démon : tel est l’état de l’âme des pécheurs. Il en est tout autrement des âmes des justes.
Pleines de jeunesse et de vigueur, elles sont toujours à la fleur de l’âge, prêtes, au combat et à la lutte ; tandis que celles des pécheurs tombent au premier choc et périssent. C’est ce que déclare le prophète, quand il dit : « Comme la poussière que le vent soulève de la surface de la terre ». (Ps. 1) Ainsi ils sont mobiles et livrés aux insultés du, premier venu, ceux qui vivent dans le péché. Car leur vue n’est pas saine, ils n’entendent pas clair, ils ne parlent, pas distinctement, ils sanglotent et bavent beaucoup. Et plût au ciel qu’ils ne fissent que rejeter de la salive et point d’inconvenances ! mais ils profèrent des paroles plus puantes que la boue ; et, ce qu’il y a de pire, ils ne peuvent pas même en rejeter l’écume ; mais, chose horrible ! ils la reçoivent dans leurs mains, la pétrissent de nouveau quand elle est épaissie et dure. Peut-être ce tableau excite-t-il votre dégoût ; que serait-ce donc de la réalité ! Si tout cela est désagréable dans le corps, à bien plus forte raison dans l’âme.
Tel était ce jeune homme qui avait dépensé tout son bien, et était descendu si bas dans le vice, qu’il était plus faible qu’un homme malade ou en délire. Mais, dès qu’il le voulut, il redevint jeune, par le seul fait de sa volonté et de son changement. Sitôt qu’il eut dit « Je retournerai chez mon père » (Lc. 15,13), ce mot fut pour lui la source de tous les biens ; ou plutôt ce ne fut pas ce mot seulement, mais aussi l’acte qui l’accompagna. En effet il ne se contenta pas de dire : « Je retournerai », et de rester en place : niais il dit : « Je retournerai », et il retourna, et il fit la route tout entière. Agissons de même ; fussions-nous sur la terre