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Page:Jean Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 10, 1866.djvu/295

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commandé ? Car « J’acquiesce à la loi, comme étant bonne. Maintenant ce n’est plus moi qui fais cela, mais le péché qui habite en moi. Car je sais que le bien n’habite pas en a moi, c’est-à-dire dans ma chair (17, 18) ». C’est sur ce texte qu’insistent ceux qui calomnient la chair et nient qu’elle soit l’ouvrage de Dieu. Que dirons-nous donc ? Ce que nous disions hier à propos de la loi ; qu’ici, comme là, Paul attribue tout au péché. En effet il ne dit point : C’est la chair qui fait cela, mais il dit au contraire : « Maintenant ce n’est plus a moi qui fais cela, mais le péché qui habite en moi ». Que s’il dit que le bien n’habite « pas dans la chair, ce n’est point encore une accusation contre elle : car de ce que le bien n’habite pas en elle, ce n’est pas une preuve qu’elle ne soit pas bonne. Nous convenons que la chair est inférieure à l’âme, qu’elle est plus défectueuse, sans cependant être son ennemie, ni son adversaire, ni mauvaise en elle-même ; mais nous disons qu’elle est soumise à l’âme comme la lyre au musicien, comme le navire au pilote : instruments qui ne sont point ennemis de ceux qui les dirigent ou les manient, mais s’accordent parfaitement avec eux, sans être leurs égaux en dignité. Comme donc en disant que l’art n’est pas dans la lyre ni dans le vaisseau, mais dans le pilote et dans le musicien, on ne calomnie pas ces instruments, on indique seulement la distance qui les sépare de ceux qui les emploient ; ainsi Paul en disant : « Le bien n’habite pas dans ma chair », ne calomnie pas le corps, mais marque la supériorité de l’âme sur lui, car c’est à l’âme que sont confiées les fonctions de pilote et de musicien ; et c’est ce que Paul veut exprimer, en lui attribuant l’autorité. Partageant l’homme en deux parties, l’âme et le corps, il dit que la chair est dénuée de raison, privée d’intelligence, qu’elle doit âtre conduite et ne saurait conduire ; tandis que l’âme plus sage, pouvant discerner ce qu’il faut faire et ce qu’il faut éviter, ne peut cependant modérer le cheval à son gré : reproche qui ne s’adresse pas seulement au corps, mais aussi à l’âme, qui sachant ce qu’il faut faire, n’exécute cependant pas ce qu’elle approuve. « En effet, le vouloir réside en moi », nous dit-il, « mais pour ce qui est d’accomplir le bien, je ne l’y trouve pas ». Ici encore en disant ; « Je ne l’y trouve pas », il n’entend pas parler de l’ignorance ou du doute, mais du tort causé par le péché et des pièges qu’il tend ; ce qu’il exprime plus clairement en ajoutant : « Ainsi le bien que je veux, je ne le fais point ; mais le mal que je ne veux pas, je le fais. Si donc je fais ce que je ne veux pas, ce n’est pas moi qui le fais, mais le péché qui habite en moi (19, 20) ». Voyez-vous comment, justifiant la substance de l’âme et celle du corps, il rejette tout sur la mauvaise action ? En effet, s’il ne veut pas le mal, l’âme n’est pas coupable ; s’il ne le fait pas, le corps est exempt de faute : tout est l’effet de la mauvaise volonté. Car il faut distinguer avec soin l’âme, le corps et la volonté : ces deux premiers sont les œuvres de Dieu, et l’autre est un mouvement qui part de nous et tend où nous le dirigeons. La faculté de vouloir est naturelle et vient de Dieu ; mais telle ou telle volonté vient de nous et est l’œuvre de notre choix.
« Je trouve donc, quand je veux faire le bien, cette loi, que le mal réside en moi ». Ces paroles sont obscures : quel en est le sens ? J’approuve la loi dans ma conscience, nous dit-il ; je la trouve d’accord avec moi quand je veux faire le bien, elle fortifie ma volonté ; et comme je me complais en elle, aussi agrée telle mon intention. Voyez-vous comme il démontre que la distinction du bien et du mal nous a été donnée dès le principe, que la loi de Moïse l’approuve et en est approuvée ? En effet, plus haut il n’a pas dit : J’apprends de la loi, mais : « J’acquiesce à la loi » ; il n’a pas dit : La loi m’instruit, mais : « Je me complais en elle ». Qu’est-ce que cela : « Je me complais ? » Je conviens qu’elle est bonne, puisqu’elle est d’accord avec moi quand je veux faire le bien. Ainsi vouloir le bien et ne pas vouloir le mal date du commencement ; mais la loi survenant a accusé davantage chez les méchants et approuvé davantage chez les bons. Le voyez-vous attester partout l’extension et l’augmentation de la loi, mais rien de plus ? Car bien que la loi m’approuve, que je me complaise en elle et que je veuille le bien, le mal est pourtant là et son action n’est pas détruite. Ainsi la loi ne vient en aide à celui qui se propose de faire le bien, qu’autant qu’il veut ce qu’elle veut. Mais comme il n’avait dit cela qu’obscurément, il l’explique ensuite et l’exprime, plus clairement, en faisant voir comment le mal est présent et comment la loi