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Page:Jean Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 10, 1866.djvu/331

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ce criminel l’est aussi, et beaucoup plus. Il fallait donc qu’ils fussent ou punis ou honorés tous les deux. C’est quelque chose de ce genre, de plus étonnant même, qui a eu lieu à l’occasion des Gentils et des Juifs. Que tous étaient indignes, l’apôtre l’a fait voir plus haut, en disant : « Car tous ont péché et ont besoin de la gloire de Dieu » (Rom. 3,23) ; mais l’étrange c’est que, tous étant indignes, les Gentils seuls soient sauvés. Après tout cela, on peut encore faire une objection et dire : Si Dieu ne devait pas accomplir ses promesses, pourquoi les a-t-il faites ? Les hommes, ignorant l’avenir, sujets à beaucoup de déceptions, peuvent promettre à des sujets indignes ; mais pourquoi Dieu, qui connaît le présent et l’avenir, et qui savait parfaitement qu’on se rendrait indigne de ses promesses et qu’on n’en recueillerait point les fruits, pourquoi les a-t-il faites ?
5. Comment Paul résout-il cette objection ? En faisant voir quel est l’Israël, à qui les promesses ont été faites. Une fois cette explication donnée, il devient évident que les promesses ont été toutes accomplies. C’est ce qu’il déclare quand il dit : « Tous ceux qui descendent d’Israël ne sont pas Israélites ». C’est pourquoi il ne donne pas le nom de Jacob, mais celui d’Israël, qui était le symbole de la vertu du juste, nom qui lui avait été donné d’en haut, et était la preuve que Dieu lui était apparu. Et cependant, direz-vous, tous ont péché et sont privés de la gloire de Dieu. Si tous ont péché, comment les uns sont-ils sauvés et les autres perdus ? Parce que tous n’ont pas voulu venir. En ce qui regarde Dieu, tous ont été sauvés, puisque tous ont été appelés. Cependant ce n’est point là ce que dit l’apôtre ; mais il résout la difficulté par d’autres exemples ; comme plus haut il introduit une autre question, et détruit une très-grave objection par une autre objection.
En effet, quand il s’agissait de savoir comment, le Christ étant justifié, tous les hommes ont obtenu la même justification, il produit le fait d’Adam, en disant : « Si par le péché d’un seul, la mort a régné, à plus forte raison ceux qui reçoivent l’abondance de la grâce, régneront-ils dans la vie ». (Rom. 5,10). Il ne résout point la difficulté en ce qui regarde Adam, mais il répond et il se place à son propre point de vue, et montre qu’il est bien plus raisonnable que le Christ, qui est mort pour eux, exerce sur eux librement son empire. En effet beaucoup pensent qu’il n’est guère juste que tous soient punis pour le péché d’un seul ; mais que tous soient justifiés par le mérite d’un seul, voilà qui est bien plus conforme à la raison et bien plus digne de Dieu. Cependant Paul ne résout pas la première question ; car plus elle est obscure, mieux le Juif est réduit au silence ; son embarras se reporte sur le, fait d’Adam, et l’autre point qui regarde le Christ en devient plus clair. De même ici, l’apôtre tire sa solution d’autres objections : car c’est aux Juifs qu’il a affaire. Il ne rend donc point raison des exemples qu’il produit ; il n’y est point obligé, puisqu’il combat les Juifs ; mais il s’en sert pour faire ressortir l’évidence de ce qu’il affirme. Pourquoi vous étonner, leur dit-il, que, parmi les Juifs, les uns soient sauvés et que les autres ne le soient pas ? Vous pouvez en voir autant chez les anciens patriarches. Pourquoi Isaac seul porte-t-il le nom de descendant, bien qu’Abraham fût aussi père d’Ismaël et de beaucoup d’autres enfants ? Est-ce parce qu’Ismaël était né d’une servante ? Mais qu’est-ce que cela fait par rapport au père ? Du reste je ne discute pas là-dessus ; qu’on chasse Ismaël à cause de sa mère, soit ; mais que dirons-nous de ceux qui sont nés de Cétura ? n’étaient-ils pas libres et nés de femme libre ? Pourquoi n’ont-ils point partagé les privilèges d’Isaac ? Mais pourquoi parler de ceux-là ? Rébecca fut la seule femme d’Isaac ; elle eut deux fils, et les eut de lui ; et cependant ces deux enfants, engendrés du même – père, de la même mère, d’une même couche, ayant le même père, la même mère, et, de plus, jumeaux, n’eurent point le même sort. Ici, on ne peut pas, comme pour Ismaël, objecter que la mère était servante ; ni que l’un est né d’une mère et l’autre d’une autre, comme pour Sara et Cétura, puisqu’ils sont sortis du même sein, à la même heure. C’est pourquoi Paul, comme passant à un exemple plus évident, dit : « Non seulement » cela est arrivé pour Isaac, « mais aussi Rébecca qui eut deux fils à la fois d’Isaac, notre père. Car avant qu’ils fussent nés ou qu’ils eussent fait ni aucun bien ni aucun mal, afin que le décret de Dieu demeurât ferme selon son élection, non à cause de leurs œuvres, mais par la volonté de celui qui appelle, il lui fut dit : L’aîné servira sous le plus jeune, selon qu’il est écrit : J’ai aimé. et j’ai haï « Esaü (10-13) ».