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Page:Jean Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 10, 1866.djvu/427

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voilà pourquoi il a recours à leurs prières. Et il ne dit pas. Afin que je me mesure avec les incrédules, mais : « Afin que je sois délivré » ; c’est conforme au précepte du Christ : « Priez, pour ne pas entrer en tentation ». (Mt. 20,41) Ces paroles avaient pour but de montrer que des loups cruels, que des êtres qui ressemblaient plus à des bêtes féroces qu’à des hommes, voulaient se jeter sur lui. Paul avait encore une autre pensée ; il veut prouver que c’est avec raison qu’il s’est fait de cette manière le serviteur des saints, si le nombre des incrédules était si grand que des prières fussent nécessaires pour l’en délivrer. Au milieu de tant d’ennemis, les saints étaient exposés à mourir de faim ; de là, la nécessité de leur procurer des vivres venant d’ailleurs. « Et que les saints de Jérusalem reçoivent favorablement mon service et mes soins » ; c’est-à-dire, et que mon sacrifice soit bien accueilli, que mes dons leur soient agréables. Voyez-vous comme il relève maintenant la dignité de ceux qui reçoivent, puisqu’il réclame les prières d’un si grand peuple, pour que ses dons soient reçus ? Il montre en outre, par ces paroles, une autre pensée, à savoir que l’aumône toute seule ne suffit pas. Quand ou ne donne due parce que l’on y est forcé, quand on donne ce qui est mal acquis, quand on se propose une vaine gloire, le fruit est perdu.
« Et que je sois plein de joie, quand j’irai auprès de vous, si c’est la volonté de Dieu (32) ». De même qu’il disait eu commençant : « Que je trouve enfin quelque voie favorable, si c’est la volonté de Dieu, pour aller vers vous » (Rom. 1,10) ; de même ici, c’est sous la même volonté qu’il s’abrite, et il dit : Je me hâte, je prie pour être délivré des dangers de Jérusalem, afin de vous voir au plus vite, et de vous voir remplis de joie, sans y trouver aucun motif d’affliction. « Et que je goûte le repos avec vous ». Voyez encore ici quelle modestie il montre. Il ne dit pas : Et que je vous instruise, que je vous donne des règles de vie, mais : « Et que je goûte le repos avec vous ». Or c’était un athlète infatigable ; comment donc peut-il dire : « Que je goûte le repos ? » Il fait entendre des paroles qui leur soient agréables, qui relèvent leurs courages, qui les associent à ses couronnes, qui les montrent, eux aussi, prenant leur part des combats et des sueurs. Ensuite, selon son habitude, il joint la prière à l’exhortation, il dit : « Que le Dieu de paix soit avec vous tous ». Amen. « Je vous recommande notre sœur Phébé, diaconesse de l’Église de Cenchrée ». (16,1) Voyez quel honneur il lui fait ; il la nomme avant tous les autres, et il l’appelle sueur ; ce n’est pas un honneur vulgaire, que d’être appelée sœur de Paul. Et il joint encore à ce titre une dignité ; il l’appelle diaconesse. « Afin que vous là receviez dans le Seigneur, comme il est digne de recevoir les saints (2) ». Ce qui veut dire : afin qu’en considération du Seigneur, elle soit honorée auprès de vous. En effet, celui qui reçoit, en considération du Seigneur, supposé même qu’il ne reçoive pas un personnage considérable, le reçoit avec empressement ; or, quand il arrive que c’est une sainte, considérez de quels soins il convient de l’entourer. Voilà pourquoi l’apôtre ajoute « Comme il est digne de recevoir les saints », comme le devoir commande d’accueillir de telles personnes. Or, vous devez l’honorer pour deux raisons, et à cause du Seigneur, et parce que c’est une sainte. « Et que vous l’assistiez dans toutes les choses où elle pourrait avoir besoin de vous ». Voyez-vous comme il tient à ne pas être importun ? Il ne dit pas : Et que vous la mettiez à son aise, mais : Et que vous fassiez ce qui dépend de vous, et que vous lui tendiez la main, et cela, dans les circonstances où elle pourrait avoir besoin de vous, non pas absolument dans tous ses embarras, mais seulement lorsque votre aide lui serait nécessaire ; or elle n’aura besoin de vous qu’autant que vous pourrez l’obliger. Ensuite vient un éloge incomparable : « Car elle en a assisté elle-même plusieurs, et moi en particulier ». Comprenez-vous la prudence de l’apôtre ? Pour commencer, des éloges ; ensuite, au milieu, l’exhortation ; ensuite, de nouveaux éloges ; il enferme, des deux côtés, les services auxquels a droit cette bienheureuse femme dans les louanges qu’il fait d’elle. Comment refuser le nom rte bienheureuse à celle femme qui a mérité de la part de Paul un si beau témoignage, qui a été à même d’assister celui qui a instruit la terre ? Car voilà ce qui a mis le comble à sa gloire ; aussi l’apôtre n’énonce-t-il ce litre qu’en dernier lieu : « Et moi, en particulier ». Qu’est-ce à dire : « Et moi en particulier ? » Moi, le héraut des nations, moi qui ai souffert tant d’épreuves, moi qui suffis à tant de milliers d’hommes. Imitons donc cette sainte,