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Page:Jean Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 10, 1866.djvu/477

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lui avait été communiquée en même temps. Car c’était vraiment le fait d’une grande force ; et un zèle humain n’aurait pu y suffire. Paul apporta trois choses à la prédication : un zèle bouillant et intrépide, une âme prête à tout supporter, et enfin l’intelligence et la sagesse ; car ce n’eût pas été assez du courage, d’une vie irréprochable, s’il n’avait reçu en outre la vertu de l’esprit. Voyez-en la preuve chez lui-même d’abord, ou plutôt, écoutez ce qu’il écrit : « Afin que notre ministère ne soit pas censuré » (2Co. 6,3) ; et encore : « En effet, notre prédication a été exempte d’erreur, d’impureté, de paroles de flatterie, de prétexte d’avarice ». (1Th. 2,3-5) Voyez-vous qu’elle était irréprochable. Et ailleurs : « Ayant soin de faire le bien, non seulement devant Dieu, mais encore devant les hommes ». (Rom. 12,17) Ensuite : « Chaque jour je meurs, oui, par la gloire que je reçois de vous en Jésus-Christ Notre-Seigneur ». (1Co. 15,31) Et encore : « Qui nous séparera de l’amour du Christ ? La tribulation, la détresse ou la persécution ? » (Rom. 8,35) Et ailleurs : « Par une grande patience dans les tribulations, dans les nécessités, dans les persécutions, dans les angoisses, sous les coups, dans les prisons ». (2Co. 6,4-5) Puis sa conduite pleine de sagesse : « Je me suis fait Juif avec les Juifs, avec ceux qui sont sous la loi comme si j’eusse été sous la loi ». (1Co. 9,20-21) Il se rase et se soumet à mille pratiques. Mais ce qui passe avant tout, c’est qu’il agissait par la vertu de l’Esprit-Saint. « Car je n’oserai parler d’aucune des choses que le Christ n’a pas faites par moi ». (Rom. 15,18) Car en quoi avez-vous été inférieurs aux autres Églises ? enfin : « Car je n’ai été inférieur en rien aux plus éminents apôtres, quoique je ne sois rien. ». (2Co. 12,13,11) Sans cela la chose eût été impossible. Ce n’est point par des miracles qu’il convertit : les miracles n’y faisaient rien : Ce n’est pas, de cela qu’il croyait devoir se prévaloir, mais d’autres choses. Il faut être irrépréhensible, sage, hardi, persuasif. C’est par là qu’il réussit en général : et dès qu’il avait cela, les miracles devenaient superflus. Nous voyons du moins que, même avant d’avoir opéré aucun miracle, il avait fait mille choses de ce genre.

Et nous, sans avoir rien de tout cela, nous voulons réussir en tout. Or, ôtez l’une de ces choses, le reste devient inutile. Car à quoi bon être hardi, si l’on est sujet aux reproches dans sa conduite ? « Si la lumière qui est en toi est ténèbres, les ténèbres elles-mêmes, que seront-elles ? » Et que sert d’avoir une vie irréprochable, si l’on est paresseux et nonchalant ? « Si quelqu’un ne porte pas sa croix, et ne marche pas à ma suite, il n’est pas digne de moi ». Et encore : « Si quelqu’un ne donne pas sa vie pour les brebis », et la suite. Et que sert de réunir ces deux conditions, si l’on manque d’adresse pour répondre à chacun comme il convient ? Or, si les signes ne dépendent pas de nous, ces deux choses sont en notre pouvoir. Paul, tout en s’attribuant toutes ces qualités, en reportait néanmoins tout l’honneur à la grâce. C’est le fait d’un serviteur reconnaissant. Et nous ne connaîtrions pas même ses grandes actions, s’il n’eût été forcé de nous en instruire. Est-ce que nous sommes dignes, même de nous souvenir de Paul ? Bien qu’il eût la grâce avec lui, il ne se tenait pas néanmoins pour content, et affrontait pour sa part mille dangers. Et nous, qui n’avons point le même crédit, sur quoi compter, dites-moi, ou pour garder ceux qui nous sont confiés, ou pour gagner ceux qui se tiennent encore à l’écart, nous, hommes adonnés à la mollesse, avides de repos à tout prix, incapables de résister, même en songe, à un péril, ou plutôt, incapables de le vouloir, nous, aussi éloignés de la sagesse de Paul que le ciel est éloigné de la terre ? Si ceux qui sont sous notre direction restent si loin des hommes d’alors, c’est que les disciples d’alors valaient mieux que les docteurs d’aujourd’hui : ils étaient circonvenus de tous côtés par les peuples et les tyrans ; la guerre les assiégeait de toutes parts : et rien ne pouvait les abattre ni les fléchir.

4. Écoutez du moins ce que dit Paul aux Philippiens : « Puisqu’il vous a été donné touchant le Christ, non seulement de croire en lui, mais aussi de souffrir pour lui ». Aux Thessaloniciens : « Vous êtes devenus imitateurs des Églises de Dieu qui sont en Judée ». Aux Hébreux : « Vous avez supporté avec joie l’enlèvement de vos biens ». Aux Colossiens : « Car vous êtes morts, et votre vie est cachée avec Jésus en Dieu » : et il témoigne en même temps de beaucoup de périls courus par le même peuple. Aux Galates : « Vous avez souffert tant de maux sans motifs, si toutefois