Aller au contenu

Page:Jean Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 10, 1866.djvu/505

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

« En vous tous » : Il habite chez tous. On a dit pourtant que ceci était propre au Fils ; si c’était l’effet d’un abaissement, Paul ne dirait point la même chose du Père. – « Or, à chacun de nous a été donnée la grâce ». Comment se fait-il donc, dira-t-on, que les grâces soient diverses ? Cette pensée ne cessait d’inspirer aux Éphésiens, comme aux Corinthiens et à beaucoup d’autres, soit l’orgueil, soit le découragement et l’envie. Voilà pourquoi il recourt partout à cet exemple du corps et ici même, sur le point de faire mention de la diversité des grâces. Il insiste en plus grand détail sur cette question dans son épître aux Corinthiens, parce que la maladie faisait chez eux plus de ravages que partout ailleurs. Ici il se borne à une allusion, et considérez comment il s’exprime. Il ne dit pas : Selon la foi de chacun : ç’eût été jeter dans le désespoir ceux à qui les grandes prérogatives avaient été refusées. Il dit : « Selon la mesure du don de Jésus-Christ ». Les choses les plus importantes, veut-il dire, sont communes à tous : le baptême, le salut par la foi, le titre de fils par rapport à Dieu, la participation à l’Esprit. Si tel ou tel est mieux partagé que toi en quelque chose, ne te plains pas : car sa tâche aussi est plus grande. Celui qui avait reçu cinq talents, eut à rendre compte de cinq ; celui qui en avait reçu deux, en rapporta deux seulement ; et ne fut pas moins bien rétribué que l’autre. Aussi en cet endroit emploie-t-il justement cette raison pour consoler son auditeur. « Pour la perfection des saints, pour l’œuvre du ministère, pour l’édification du corps du Christ ». De là encore cette parole du même : « Malheur à moi, si je n’évangélise pas ! » (1Co. 9,16) Par exemple, quelqu’un a reçu le don d’apostolat. C’est donc à lui qu’il faut crier : Malheur à lui qui a reçu cette grâce : pour vous, vous êtes hors de danger. « Selon la mesure ». Qu’est-ce à dire : « Selon la mesure ? » Entendez, non pas en proportion de notre mérite : autrement personne n’aurait obtenu ce qui lui a été donné. Nous ne possédons rien que par un don.
2. Mais pourquoi l’un a-t-il plus, l’autre moins ? Cela n’y fait rien, répond Paul ; la chose est indifférente – car chacun contribue à l’édification. — Paul fait voir par là que ce n’est point en vertu de son mérite que l’un a eu plus, l’autre moins ; mais en considération des autres, et selon la répartition faite par Dieu même ; car le même Paul dit dans un autre passage : « Dieu a placé dans le corps chacun des membres comme il l’a voulu ». (1Co. 12,18) Il ne donne point d’autre raison pour ne pas abattre la confiance de ses auditeurs. C’est pourquoi l’Écriture dit : « Montant au ciel, il a conduit une captivité captive ; il a donné des dons aux hommes (8)… » C’est comme s’il disait : Pourquoi t’enorgueillir ? Tout te vient de Dieu. Le Prophète dit dans un psaume : « Tu as reçu des dons parmi les hommes ».(Psa. 67,19) Paul dit : « Il a donné des dons aux hommes ». C’est la même chose. Interprétez pareillement ceci : « Mais qu’est-ce : Il est monté, sinon qu’il est descendu auparavant dans les parties inférieures de la terre ? Celui qui est descendu est le même qui est monté au-dessus de tous les cieux, afin qu’il remplît toutes choses (9, 10) »
En entendant cela, ne vous figurez point un déplacement. Il établit ici le même point que dans son épître aux Philippiens. Dans cette épître, il cite le Christ à l’appui d’une exhortation concernant l’humilité : il procède ici de la même manière, en disant : « Il est descendu dans les parties inférieures de la terre ». Autrement, c’est en vain qu’il dirait : « Ayant été obéissant jusqu’à la mort ». (Phi. 2,7-8) L’ascension suppose la descente. Par les parties inférieures de la terre, il faut entendre la mort : C’est une expression appropriée à l’opinion commune, et qui rappelle celle de Jacob : « Vous ferez descendre ma vieillesse avec douleur aux enfers ». (Gen. 44,29) De même on lit dans un psaume : « Je serai rendu semblable à ceux qui descendent dans la fosse » (Ps. 142, 7), c’est-à-dire aux morts. Pourquoi Paul traite-t-il ici ce sujet ? et quelle captivité a-t-il en vue ? Celle du diable. Jésus-Christ a fait prisonnier le tyran, je veux dire le diable, et avec lui la mort, la malédiction, le péché. Voyez-vous ce butin, ces dépouilles ? « Mais qu’est-ce : il est monté, sinon qu’il est descendu auparavant ? » Ceci est pour les sectateurs de Paul de Samosate. « Celui qui est descendu est le même qui est monté au-dessus de tous les cieux, afin qu’il remplît toutes choses ». Il est descendu dans les parties inférieures de la terre, dans celles au-dessous desquelles il n’y a rien ; et il est monté au-dessus de tout, à un degré après lequel il n’y a