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Page:Jean Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 10, 1866.djvu/591

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l’orthodoxie, s’est plié aux circonstances et n’a pas dit ce qu’il pensait, cela non plus n’est pas bien grave. Un autre, dans un moment de colère, a menacé de renier la vraie foi, mais il n’y a pas encore là de quoi le punir ; c’est la colère, l’impatience-qui l’ont fait pécher. Et combien d’autres péchés du même genre ne trouverait-on pas qui se glissent dans les églises ? Et voilà ce qui nous attire les railleries des Juifs et des gentils, quand ils voient l’Église partagée en mille et mille sectes. Si tout d’abord ceux qui entreprennent d’échapper aux liens sacrés de la religion, et d’ébranler tant soit peu ses dogmes, recevaient le châtiment qu’ils méritent, la peste qui nous désole aujourd’hui ne se serait pas produite, et les Églises ne seraient pas assaillies par une aussi violente tempête. Voilà pourquoi l’apôtre dit que la circoncision est le renversement de l’Église.
7. Aujourd’hui beaucoup parmi nous jeûnent le même jour que les Juifs, et observent le sabbat comme eux : et nous sommes assez généreux, ou plutôt assez faibles pour tolérer de telles pratiques. Et pourquoi parlé-je des Juifs ? Il y en a même parmi les nôtres qui ont emprunté aux païens, bon nombre de leurs coutumes, qui pratiquent les enchantements, – qui croient aux augures, aux présages, qui observent superstitieusement les jours, qui tirent l’horoscope des enfants, et qui leur mettent sur la tête, pour leur malheur, au moment où ils viennent au monde, ces petits billets où chaque lettre est une impiété, leur enseignant ainsi, dès leur début dans la vie, à reculer devant les épreuves qu’impose la conquête de la vertu, et les remettant, autant que cela dépend d’eux, à l’aveugle tyrannie du destin. Si le Christ ne sert de rien à ceux qui sont circoncis, en quoi la foi pourra-t-elle contribuer au salut de ceux qui seront cause de tant de malheurs ? Cependant la circoncision avait été imposée par Dieu ; mais comme l’observation intempestive de cette pratique contrariait le développement du christianisme, Paul a fait tous ses efforts pour la supprimer. Ensuite, Paul s’est donné tant de mal pour combattre les coutumes des Juifs parce qu’on les observait mal à propos, et nous ne retrancherons rien à celles des gentils ? Quelle excuse aurons-nous à donner ? Aussi notre Église est-elle dans le trouble et dans la confusion, et ceux qui devraient recevoir les enseignements des maîtres de la doctrine, pleins de présomption ont changé les rôles, ont tout bouleversé. Et si parmi leurs supérieurs quelqu’un veut les reprendre un peu, ils les traitent avec le dernier mépris, et nous devons nous en prendre à nous-mêmes qui les avons mal élevés. Cependant, quand même leurs supérieurs seraient plus corrompus qu’ils ne le sont, quand même ils auraient toutes sortes de vices, même dans ce cas il ne devrait pas être permis au disciple de faire fi de leurs avertissements. Si l’on a pu dire des docteurs des Juifs, que par cela même qu’ils étaient assis sur la chaire de Moïse (Mt. 23,2), ils avaient droit à se faire écouter de leurs disciples, quand même leur conduite serait telle qu’on dût recommander à ceux-ci de ne pas la prendre pour modèle, et de ne pas l’imiter, de quel pardon seront-ils dignes ceux qui conspuent et foulent aux pieds les chefs de l’Église dont la vie, grâce à Dieu, est ce qu’elle doit être ? S’il nous est interdit de nous juger les uns les autres, combien plus de juger les maîtres qui nous instruisent.
« Mais quand même je vous annoncerais « moi-même, ou quand un ange du ciel vous annoncerait un Évangile différent de celui « que vous avez reçu, qu’il soit anathème (8) ». Voyez la prudence de l’apôtre. Pour qu’on ne dise pas que c’est par pure vanité qu’il vante les dogmes que lui-même a prêchés, il appelle l’anathème sur sa propre tête. Les Galates se retranchaient derrière les grands noms de Jacques et de Jean voilà pourquoi il parle des anges : Ne m’opposez plus Jacques ni Jean leur dit-il, quand même ce serait un des premiers parmi les anges du ciel qui tenterait de dénaturer ces dogmes, qu’il soit anathème. Et ce n’est point par hasard qu’il a dit « du ciel ». Les prêtres étaient appelés des anges : « Les lèvres du prêtre garderont la science, et l’on cherchera la loi de sa bouche, parce qu’il est un ange du Seigneur tout-puissant ». (Mal. 2,7) Pour qu’on ne croie pas que par ce nom d’anges il désigne ces prêtres, l’apôtre ajoute ces mots « du ciel », en faisant allusion aux puissances d’en haut. Il n’a pas dit : S’ils enseignent le contraire, ou s’ils renversent ma doctrine, mais : Quand même leur Évangile ne différerait qu’à peine du mien, quand même ils ne s’attaqueraient qu’aux parties les moins importantes, qu’ils soient anathèmes.
« Comme je l’ai dit auparavant, et comme je le dis encore (9) ». Afin qu’on ne s’imagine