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Page:Jean Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 10, 1866.djvu/600

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pensait qu’il avait tort d’agir ainsi et que ses courses étaient vaines : « J’allai à Jérusalem », dit-il, « et je leur communiquai l’Évangile que je prêche », non pas pour en apprendre personnellement quelque chose (plus loin il s’explique plus nettement là-dessus), mais pour faire comprendre à ceux qui conservaient des doutes que je n’étais point dans l’erreur. Le Saint-Esprit qui prévoyait ces chicanes, lui inspira l’idée d’aller à Jérusalem et d’y faire connaître ses doctrines. C’est pour cela qu’il dit : « Je m’y rendis par suite d’une révélation », et qu’il prit avec lui Tite et Barnabé comme témoins de son enseignement.
« Et je leur exposai l’Évangile que je prêche aux gentils », c’est-à-dire, que je prêche sans parler de la circoncision, « Et en particulier à ceux qui paraissaient les plus considérables ». Que signifient ces mots « En particulier ? » Quand on veut réformer dés dogmes communs à tous, ce n’est pas en particulier, mais en public qu’on doit le faire. Paul ne fit pas ainsi : c’est qu’il ne voulait rien apprendre, ni rien réformer, mais il voulait détruire le prétexte dont se couvraient ceux qui cherchaient à tromper les fidèles. Comme tous dans Jérusalem se seraient scandalisés si quelqu’un s’était permis de transgresser la loi et d’interdire l’usage de la circoncision, ce qui faisait dire à Jacques : « Vous voyez, mon frère, combien de milliers de Juifs ont cru : or tous ont ouï dire que vous enseignez à renoncer à la loi ». (Act. 21,20, 21) ; comme tous étaient prêts à se scandaliser, il n’eut pas le courage de passer outre, de parler en toute liberté et de mettre son enseignement au grand jour. Il le communique en particulier aux plus considérables, en présence de Tite et de Barnabé, afin qu’ils pussent tous deux témoigner devant ses adversaires que les apôtres, loin de trouver son enseignement contraire à celui de l’Église, le sanctionnaient tel qu’il était… En se servant de cette expression « A ceux qui paraissaient les plus considérables », il n’a pas l’intention de contester aux apôtres la considération dont ils jouissaient, puisqu’il dit de lui-même : « Moi aussi je parais posséder l’Esprit de Dieu ». Ce langage est celui d’un homme qui mesure ses paroles, et non d’un homme qui conteste la possession d’une qualité. Il en est de même ici. « A ceux qui paraissaient les plus considérables », dit-il, en ajoutant son témoignage à celui de tous les autres fidèles.
« Mais on n’obligea point Tite que j’avais emmené avec moi, et qui était gentil, de se frire circoncire (3) ». Qu’est-ce à dire : « Il était gentil ? » – Il avait été du nombre des gentils, et n’était pas circoncis. Je n’étais pas le seul à prêcher comme je faisais, Tite en taisait autant tout incirconcis qu’il était, et les apôtres ne l’obligèrent point de se faire circoncire. – Ce qui était la meilleure preuve que les apôtres ne condamnaient ni les actes, ni les paroles de Paul. Et ce qui le prouve encore plus, c’est que les adversaires de Paul, quoiqu’ils fussent prévenus de ce qu’il faisait, ne purent malgré tout leur acharnement décider les apôtres à imposer l’usage de la circoncision. Il y fait allusion quand il parle de « Ces faux frères qui s’étaient introduits dans « l’Église (4) ». Quels étaient ces faux frères ? Car dans le moment présent cette question, n’est pas sans importance. Si les apôtres permettaient alors de pratiquer la circoncision, pourquoi traites-tu de faux frères ceux qui se conforment à l’opinion des apôtres en prescrivant l’observation de cette pratique ? D’abord, parce que ce n’est pas la même chose de prescrire de faire, ou de laisser faire. – Car celui qui prescrit, regarde ce qu’il prescrit comme une chose indispensable et de première importance, taudis que celui qui ne prescrit ni n’empêche de faire la chose que l’on veut, la permet non comme indispensable, mais par suite d’une prudente conduite. Par exemple, c’est ce qui avait lieu quand Paul écrivait aux Corinthiens au sujet des devoirs du mariage.
2. Après différents conseils sur cette matière, pour qu’on ne croie pas qu’il veuille ériger en textes de loi ses recommandations aux Corinthiens, il ajoute : « Or, je vous dis ceci par condescendance, et non par commandement ». (1Cor. 7,6) Car il ne s’agissait pas d’un jugement imposé d’autorité, mais d’une conduite indulgente pour leur penchant à l’incontinence. Aussi dit-il : « À cause de votre incontinence ». Si vous voulez connaître l’opinion de Paul à ce sujet, écoutez ces paroles : « Je désire que tous les hommes soient comme moi-même » (1Cor. 7,7), qu’ils vivent dans la chasteté. Il en était de même dans la circonstance présente : si les apôtres permettaient la circoncision,