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Page:Jean Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 10, 1866.djvu/601

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ce n’était pas pour faire observer la loi, mais par condescendance pour la faiblesse juive. S’ils avaient tenu à faire respecter la loi, ils n’auraient pas toléré deux enseignements, l’un pour les Juifs, l’autre pour les gentils. Car si la chose eût été obligatoire pour les infidèles, il est évident qu’elle l’eût été aussi pour tous les fidèles. D’un autre côté, s’ils établissaient comme une loi de ne point troubler, les gentils au sujet de la circoncision, ils montraient qu’ils ne la permettaient aux Juifs que par pure condescendance.
Il n’en était pas ainsi des faux frères, ils visaient à exclure les gentils de la grâce et à les ramener sous le joug de la servitude. C’était là la première différence, et certes elle était considérable. La seconde, c’est que les apôtres ne faisaient cela qu’en Judée, où la loi dominait, tandis que les faux frères le faisaient en tout pays, car ils s’étaient adressés à tous les Galates. D’où il est clair qu’ils agissaient ainsi, non pour édifier, mais pour détruire l’édifice jusqu’aux fondements, et que les intentions des apôtres, quand ils autorisaient la circoncision, n’étaient pas les mêmes que celles des faux frères quand ils s’efforçaient de l’imposer. – « Qui s’étaient introduits dans l’Église pour espionner la liberté que nous avons en Jésus-Christ ». Voyez-vous comme il fait allusion à leur esprit d’hostilité en employant ce mot d’espion ? Car des espions ne s’introduisent parmi leurs adversaires que pour se tenir au courant de ce qu’ils font, et en profiter pour les attaquer et détruire leur puissance. C’est ce que faisaient ces faux frères qui voulaient ramener les fidèles sous le joug de la servitude. Ce qui montre bien qu’au lieu d’avoir les mêmes vues que tes apôtres, ils étaient en complet désaccord à ce sujet. Tandis que ceux-ci permettaient la circoncision pour détacher peu à peu les fidèles de la, servitude, eux ne l’établissaient que pour les enfoncer plus avant dans la servitude. Aussi observaient-ils avec un soin scrupuleux et minutieux quels étaient ceux qui restaient incirconcis : ce que Paul nous fait entendre par ces mots : « Ils s’étaient introduits pour espionner la liberté dont nous jouissons ». Il nous dévoile leurs desseins, non seulement en se servant de ce mot d’espion, mais encore en nous les montrant qui s’introduisent, qui se glissent furtivement dans l’Église.
« Nous n’avons pas cédé à leurs ordres même pour un moment (5) ». Remarquez cette expression noble et significative. Il n’a pas dit : « À leurs observations », mais : « À leurs ordres ». Car ils agissaient ainsi non pour enseigner quelque chose d’utile, mais pour imposer leur volonté et établir la servitude, aussi nous avons bien cédé aux apôtres, mais non pas à ces gens-là. « Afin que la vérité de l’Évangile demeurât votre partage ». C’est-à-dire, afin de corroborer par nos actions ce que nous vous avons déjà dit, à savoir que « Ce qui était de vieux, est passé, et tout est devenu nouveau. » (2Cor. 5,17), et que « Si quelqu’un est en Jésus-Christ, il est devenu une nouvelle créature » (Id), et que a Jésus-Christ « ne servira de rien à ceux qui pratiquent la circoncision ». (Gal. 6,15) Pour établir plus fortement ces vérités, nous n’avons pas même cédé un instant. Ensuite comme on ne pouvait manquer de lui objecter la conduite que tenaient les apôtres, et qu’il était tout naturel que quelques-uns lui dissent : Comment se fait-il donc qu’ils prescrivent cet usage ? Voyez avec quelle habileté il détruit cette objection. Il ne dit point la vraie cause, par exemple, que les apôtres agissaient ainsi par condescendance et d’après une vue secrète, autrement il aurait porté tort à ceux qui l’écoutaient. Il faut que ceux qui doivent profiter d’une combinaison secrète en ignorent la cause, car si tout leur était dévoilé, l’avantage qu’ils peuvent en retirer serait entièrement perdu pour eux. Il faut donc que celui qui dirige la combinaison, ait le secret des événements, et que celui qui doit en avoir le profit, ne sache rien. Et pour rendre plus évident ce que je viens d’avancer, je cite un exemple pris au cœur même de notre sujet. Ce même Paul, le bienheureux Paul, qui voulait détruire la circoncision, au moment d’envoyer Timothée pour prêcher les Juifs, ne l’y envoya qu’après l’avoir d’abord fait circoncire. (Act. 16)
Paul prit cette précaution afin que Timothée fût bien reçu fie ses auditeurs, et celui-ci s’introduisit chez les Juifs avec la circoncision, pour abolir l’usage de la circoncision. Timothée, lui, savait bien le motif de cette précaution, mais il n’en dit rien à ses disciples. S’ils avaient su qu’il s’était fait circoncire précisément pour supprimer la circoncision, ils n’auraient pas écouté le premier mot de ses prédications, et tout l’avantage qu’ils devaient retirer de sa mission aurait été perdu, tandis