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Page:Jean Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 7, 1865.djvu/126

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justice », la réunion de toutes les vertus. « Vous serez bienheureux, lorsque les hommes vous diront des paroles outrageuses, qu’ils vous persécuteront, et qu’à cause de moi, ils publieront faussement toute sorte de mal contre vous (11). Réjouissez-vous alors, et tressaillez de joie, parce qu’une grande récompense vous est réservée dans les cieux (12). » Quand les hommes, dit-il, vous appelleraient séducteurs, imposteurs, ou n’importe quoi, « vous êtes bienheureux. » Qu’y a-t-il de plus nouveau que cette loi, qui appelle des biens ce que tout le monde fuit comme des maux, la pauvreté, les larmes, les persécutions, et les médisances ? Cependant Jésus a persuadé cette doctrine, non à un, non à deux, non à dix, à vingt, à cent, à mille personnes, mais généralement à toute la terre. Ce peuple qui entendait ces vérités si nouvelles, si surprenantes, et si dures, ne laissait pas d’en être frappé, tant était grande la majesté de Celui qui les publiait.
5. Ne croyez pas néanmoins qu’il suffise simplement d’être en butte à la médisance pour mériter d’être proclamés bienheureux ; le Seigneur ajoute deux conditions nécessaires, la première que les injures soient souffertes pour lui, la seconde qu’elles soient fausses. Sans ces deux conditions, on devient non pas bienheureux, mais très-malheureux de subir les médisances des hommes.
Considérez encore la récompense qu’il attache à cette béatitude ; « parce qu’une grande récompense », dit-il, « vous est réservée dans les cieux. » Pour vous, quoique vous ne voyiez pas toutes les béatitudes se terminer par la promesse du royaume des cieux, ne vous découragez pas pour cela ; car bien qu’elles diffèrent par les noms, ces récompenses se réduisent cependant tontes en effet au seul royaume des cieux. Lorsque Jésus-Christ dit que ceux qui pleurent seront consolés, que les miséricordieux recevront miséricorde, que ceux qui ont le cœur pur verront Dieu, et que les hommes de paix seront appelés les enfants de Dieu, c’est toujours le royaume du ciel qu’il désigne par toutes ces béatitudes différentes, puisque ceux qui les recevront jouiront indubitablement de ce royaume. Ne croyez donc pas qu’il ne soit que pour les pauvres d’esprit ; il est pour ceux qui ont faim et soif de la justice ; il est pour les doux, il est pour toue les autres sans exception. Telle est la récompense qu’il promet généralement à tous, afin que vous ne vous promettiez rien de terrestre ou de sensible. Car vous ne pourriez pas être « heureux », si vous n’aviez qu’une récompense périssable, qui passerait avec cette vie, et s’enfuirait plus vite qu’une ombre. Mais après avoir dit, « une grande récompense vous est réservée dans les cieux », il ajoute aussitôt cette autre consolation : « Car c’est ainsi qu’ils ont persécuté les prophètes qui ont été avant vous (12). » Comme le royaume des cieux qu’il leur promet, était un bonheur qui n’était encore qu’en espérance, il les console par avance, en leur montrant l’union et la conformité qu’ils ont avec les prophètes, qui ont souffert avant eux ces traitements si injustes. Ne croyez pas, leur dit-il, que vous soyez ainsi persécutés par les hommes, parce que vous leur enseignerez des choses dangereuses et mauvaises ; ni qu’ils vous traitent de la sorte, parce que vous serez les auteurs de quelques dogmes faux et erronés. Ces mauvais traitements ne viendront pas de la mauvaise doctrine que vous publierez, mais de la mauvaise vie de ceux qui vous écouteront. Ces calomnies ne tomberont pas sur vous qui les souffrirez, mais sur ceux qui vous les feront souffrir. Tous les siècles passés en sont témoins. Quand ils ont si maltraité les prophètes, qu’ils les ont bannis, qu’ils les ont lapidés, et qu’ils leur ont fait souffrir tant de maux : ils l’ont fait par une fureur injuste, et non point pour avoir découvert en eux quelque sentiment impie et contraire à la loi de Dieu. Ne vous troublez donc point de ces violences. Le même esprit qui animait leurs pères les animera encore.
Considérez comme il relève le courage de ses disciples en les rapprochant de Moïse et d’Élie, et les mettant sur le même rang. C’est ce que saint Paul fait en écrivant aux Thessaloniciens : « Vous êtes devenus les imitateurs des églises de Dieu, qui ont embrassé la foi de Jésus-Christ dans la Judée, puisque vous avez souffert les mêmes persécutions de vos concitoyens que ces églises ont souffertes de la part des Juifs, qui ont tué même le Seigneur Jésus, et leurs propres prophètes ; qui nous ont persécutés, qui ne plaisent point à Dieu, et qui sont ennemis de tous les hommes. » (1Thes. 2,14) Telle est donc la pensée de Jésus-Christ. Dans les autres béatitudes il disait en général : « Heureux sont les pauvres ; heureux