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Page:Jean Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 7, 1865.djvu/178

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du ciel, et tous les peuples de la terre, doivent rendre ici leur commun hommage à leur commun roi, selon ce commandement exprès que nous en fait l’Écriture : « Bénissez le Seigneur, vous tous qui êtes ses ouvrages. » (Daniel, 3,30) Car tous ses ouvrages sont admirables. Ils sont élevés au-dessus de la raison, et l’esprit humain ne les peut comprendre. Les prophètes nous les annoncent tous les jours, et chacun d’eux en relève différemment l’excellence et la grandeur. L’un dit : « Dieu montant en haut a emmené avec lui la captivité même captive, il a fait des dons aux hommes (Ps. 17,49) ;» et : « Le Seigneur est puissant, Dieu est fort dans les armées. »(Ps. 23,8) L’autre dit : « Il divisera les dépouilles des puissants, parce qu’il est venu pour annoncer aux captifs leur délivrance, et pour rendre la vue aux aveugles. » (Is. 13,12) Un autre chantant la gloire que Dieu a remportée sur la mort, s’écrie : « O mort, où est ta victoire ? ô enfer, où est ton aiguillon ? »(Os. 13,14) Un autre prédisant la paix profonde qui régnerait dans le monde dit : « On « brisera les épées pour les employer au fer « des charrues, et on changera les lances en « faux. » (Is. 2,4) Un autre parlant a Jérusalem lui dit : « Tressaillez de joie, fille de Sion fille de Jérusalem, annoncez partout que votre roi vient vous voir et vous témoigner sa douceur, qu’il est assis sur une ânesse et sur un ânon. » (Zac. 9,9) Un autre prédit son avènement, et dit : « Le Seigneur que vous cherchez viendra, et qui pourra soutenir le jour de son avènement ? Tressaillez de joie et bondissez comme de jeunes veaux qu’on a déliés. » (Joël II, 2) Un autre encore s’écrie sur le même sujet avec admiration : « C’est là notre Dieu et il n’y en a point d’autre qu’on puisse lui comparer. »(Deut. 4,35) Cependant lorsque nous entendons tant de merveilles, au lieu de trembler dans ce lieu saint, et de croire que nous sommes plutôt dans le ciel que sur la terre, nous faisons du bruit comme si nous étions dans un marché. Nous remplissons de tumulte le temple de Dieu, et nous y passons une grande partie du temps à parler de folies et de bagatelles.
Lors donc que nous sommes si négligents et en public et en particulier, et dans l’Église même, et à écouter la parole de Dieu, et dans toutes nos actions grandes ou petites ; et que de plus nous faisons tant d’imprécations contre nos ennemis, comment espérons-nous de nous sauver, puisque nous ajoutons à tant de crimes des prières encore plus criminelles ? Après cela devons-nous nous étonner s’il nous arrive quelque malheur ; et ne serait-ce pas plutôt une merveille s’il ne nous en arrivait pas ? Le premier effet semble naturel et ordinaire ; et le second est contraire à la raison. Car il serait tout à fait injuste, qu’étant ennemis de Dieu, et l’irritant continuellement, nous jouissions de son soleil, de ses pluies et de tous ses autres biens qui découlent de lui comme de leur source : puisque n’ayant que l’apparence d’hommes, nous sommes en effet plus cruels que les bêtes les plus sauvages ; puisque nous nous déchirons les uns les autres et que nous trempons notre langue dans le sang de nos frères. Et cela après avoir mangé avec eux à la table divine et spirituelle ; après avoir reçu tant de grâces pour cette vie, et tant de promesses pour être éternellement heureux en l’autre.
Pensons, mes frères, à ces vérités si importantes. Rejetons de nos âmes ce poison mortel, brisons ces chaînes de la haine et de la colère, offrons à Dieu des prières dignes de lui et de nous ; et au lieu d’être cruels comme les démons, devenons doux et charitables comme les anges. De quelque manière qu’on nous ait outragés, que le souvenir de nos péchés, et la récompense que Jésus-Christ joint à ce précepte de pardonner aux autres, adoucisse notre esprit, et arrête tous les mouvements de notre colère, afin qu’ayant toujours conservé la pair dans notre cœur pendant cette vie, Dieu nous traite dans l’autre avec autant de bonté, que nous en aurons témoignée envers nos frères. Si ce tribunal d’un Dieu nous épouvante, rendons-le-nous favorable en pardonnant à nos ennemis, et ouvrons-nous maintenant la porte de sa miséricorde, pour paraître alors devant lui avec confiance. Si nous n’avons pu mériter cette grâce en ne péchant point, nous l’obtiendrons, en pardonnant à ceux qui auront péché contre nous. Cette condition est sans doute très avantageuse pour nous, et elle ne nous sera point pénible. Faisons du bien à nos ennemis, et nous amasserons un trésor de miséricorde. Ainsi nous serons aimés non seulement des hommes, mais de Dieu même, qui nous couronnera enfin, et nous fera jouir des biens éternels que je vous souhaite, par la