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Page:Jean Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 7, 1865.djvu/203

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le prix d’une perle : ni cet homme brutal, quel est le prix de la vérité qu’on lui annonce. Puis donc qu’il ne peut la comprendre, qu’on ne la lui découvre jamais, de peur qu’il ne foule aux pieds une chose si précieuse qu’il ne comprend pas. Ceux qui sont dans cet état deviendront encore plus coupables si on les instruit. Car ils profaneront les choses les plus sacrées dont ils ignorent la sainteté, et cette instruction ne servira qu’à irriter et à armer contre nous leur orgueil et leur insolence. C’est ce que Jésus-Christ marque en ces termes : « De peur qu’ils ne les foulent aux pieds, « et que se tournant contre vous-mêmes ils ne « vous déchirent (6). » Vous me direz peut-être, que ces vérités devraient être si puissantes que l’esprit en fût convaincu aussitôt qu’il les apercevrait, et qu’elles ne pussent donner à nos ennemis des armes pour nous combattre. Je réponds à cela que si on abuse de ces vérités saintes, on ne les doit point accuser de cet abus. Elles ne sont dignes que de respect, mais les pourceaux les méprisent parce qu’ils sont des pourceaux. Ainsi lorsque ces mêmes animaux foulent une perle aux pieds, on ne l’en estime pas pour cela moins précieuse, et l’on croit que cette sorte de profanation est aussi indigne d’elle, qu’elle est digne d’eux. Il ajoute : « Et que se tournant contre vous, ils ne vous déchirent. Car ils contrefont les humbles pour apprendre nos mystères, et lorsqu’ils les savent, ils deviennent tout d’un coup d’autres hommes. Ils se raillent de nous, et ils nous insultent comme nous ayant surpris par leur artifice. C’est pourquoi saint Paul dit à Timothée : « Gardez-vous de celui-là, parce qu’il a fortement combattu la doctrine que j’enseigne. » (2Tim. 4,15). Et ailleurs : « Évitez avec soin ces personnes. » (Id) Et à Tite : « Évitez celui qui est hérétique, après l’avoir averti une et deux fois. » (Tit. 3, 10) Ce ne sont donc point nos vérités qui leur mettent les armes en main ; c’est leur orgueil et leur vanité qui les aveugle, et qui en prend occasion de s’élever plus insolemment contre nous. C’est pourquoi ce n’est pas un petit avantage qu’ils les ignorent, puisque cette ignorance les empêche de les mépriser ; que si au contraire on veut les instruire, on leur fait un double mal, parce qu’après avoir connu la vérité ils en deviennent pires au lieu d’en devenir meilleurs ; et parce qu’ensuite ils nous causent mille peines.
Qu’ils écoutent ceci, ceux qui parlent indifféremment à toute sorte de personnes, et qui rendent ainsi méprisables les choses les plus sacrées. Quand nous fermons nos portes avant que de célébrer nos mystères, et que nous renvoyons les personnes non initiées, ce n’est point que nous craignions qu’on y reconnaisse quelque chose qui les puisse faire mépriser, mais c’est que nous jugeons ces personnes indignes de participer à des sacrements si redoutables. Jésus-Christ lui-même, pour nous donner un modèle de cette réserve, a dit beaucoup de choses aux Juifs seulement en paraboles, parce qu’en « voyant ils ne voyaient pas (Mt. 13,7) ; » et saint Paul nous ordonne de savoir « comment il faut répondre à chacun de ceux qui nous interrogent. » (Col. 4,6)
4. « Demandez et l’on vous donnera ; cherchez et vous trouverez ; frappez et l’on vous ouvrira (7). Car quiconque demande reçoit, et qui cherche trouve, et on ouvrira à celui qui frappe à la porte (8). » Comme Jésus-Christ avait ordonné de si grandes choses à ses disciples ; qu’il leur avait commandé d’être exempts de toutes passions ; qu’il les avait élevés jusques au ciel, et exhortés à se rendre semblables, autant qu’il, leur serait possible, non aux anges ou aux archanges, mais è Dieu même ; comme, outre la pratique particulière de ces vertus, il leur commandait encore d’instruire les autres, de les reprendre, et de discerner les méchants d’avec les bons, et les chiens d’avec les enfants, il était à craindre que les apôtres, dans la vue de tant de choses, et particulièrement de cet abîme si impénétrable du cœur de l’homme qu’on les obligeait de discerner, ne se décourageassent et ne dissent comme saint Pierre le dit ensuite : « Qui pourra donc être sauvé ? » (Mt. 19,25) Et au même endroit : « S’il est ainsi du mariage, il n’est pas avantageux de se marier. » (Ibid. 9) Jésus-Christ donc pour les empêcher d’avoir ces pensées, après leur avoir déjà fait voir par ce qui précède, qu’il n’y a rien que d’aisé et de facile dans ses préceptes, le fait voir encore plus sensiblement dans ces dernières paroles, par lesquelles il leur promet une consolation ineffable dans leurs travaux, c’est-à-dire, celle qu’ils attireraient par une prière continuelle à laquelle il les exhorte. Vous ne devez pas, leur dit-il, vous contenter de vos efforts, mais vous devez encore implorer le secours du ciel, qui