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Page:Jean Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 7, 1865.djvu/205

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Dieu des choses spirituelles, et que je ne les reçois pas ? C’est parce que vous ne les demandez pas avec assez de ferveur. C’est parce que vous vous êtes rendu indigne de les recevoir, ou que vous avez trop tôt cessé de les demander. Pourquoi, me direz-vous, Jésus-Christ n’a-t-il pas marqué précisément ce qu’il fallait lui demander ? Il l’a marqué clairement, et vous venez de le voir. Ne dites donc point : j’ai prié, mais je n’ai rien reçu line tient jamais à Dieu que vous ne soyez exaucé. L’amour qu’il a pour vous surpasse infiniment celui des pères, et est autant élevé au-dessus du leur, que la bonté l’est au-dessus de la malice : « Si donc, étant mauvais comme vous êtes, vous savez bien néanmoins donner de bonnes choses à vos enfants, à combien plus forte raison votre Père qui est dans le ciel donnera-t-il les vrais biens à ceux qui les lui demandent (11) » ? Jésus-Christ ne nous appelle pas « mauvais » pour déshonorer notre nature, ni pour montrer qu’elles sont mauvaises par elle-même. Il veut marquer seulement qu’en comparaison de l’amour que Dieu a pour nous, toute la tendresse des pères pour leurs enfants peut passer pour malice, tant est grande la bonté et l’affection qu’il a pour les hommes !
5. Avez-vous remarqué dans ces paroles une raison de confiance, capable de rassurer les cœurs les plus abattus, et de leur faire concevoir de meilleures espérances ? Car Jésus-Christ nous y montre l’amour excessif que Dieu a pour nous en nous le représentant comme notre « père », au lieu qu’auparavant il nous l’avait représenté comme le Créateur de notre âme et de notre corps. Néanmoins, quoi qu’il dise ici du grand amour de Dieu envers nous, il n’en découvre pas encore la plus grande preuve et le principal effet, qui est son incarnation et sa présence visible. Car, comment Celui qui a livré pour nous son Fils à la mort, ne nous donnera-t-il pas tout le reste ? Aussi Jésus-Christ n’avait pas encore été crucifié, et il ne pouvait pas nous en parler. Mais saint Paul le fait lorsqu’il dit : « Comment celui qui n’a pas épargné son Fils unique, mais qui l’a livré pour nous tous, ne « nous donnera-t-il pas avec lui toutes choses ? » (Rom. 8,32) Le Sauveur, cependant, ne parle point encore d’un si grand bienfait, mais seulement de faveurs plus sensibles et plus proportionnées à l’esprit des hommes.
Il nous apprend ensuite ces deux choses très importantes, que nous ne devons pas nous confier uniquement dans nos prières, sans les accompagner de nos bonnes œuvres et de nos efforts ; et que nous ne devons pas non plus nous appuyer entièrement sur notre travail et sur nos efforts, mais y joindre la prière, et implorer sans cesse le secours de Dieu li nous commande continuellement d’allier ces deux choses ensemble. C’est pourquoi, après avoir donné beaucoup d’avis importants à ses disciples, il les exhorte à la prière dont il leur trace le modèle ; et après leur avoir enseigné à prier, il leur donne encore de nouveaux avis pour leur conduite. Puis il retourne encore à la nécessité d’une prière continuelle en disant : « Demandez, cherchez et frappez », et il revient encore une fois à la nécessité du zèle et des efforts vertueux. « Faites donc à autrui ce que vous voulez que l’on vous fasse ; car c’est toute la loi et les Prophètes (12). » II dit ici comme en abrégé tout ce qu’il a dit auparavant, et il montre que la vertu peut se réduire à peu de paroles très aisées et très intelligibles à tout le monde. Il ne dit pas simplement : Faites à autrui, mais : « Faites donc à autrui. » Ce n’est pas sans raison qu’il met ce mot « donc ; » c’est comme s’il disait : Si vous désirez d’être exaucé, outre les autres avis que je vous ai déjà donnés, pratiquez encore celui-ci : « Faites à autrui ce que vous voulez que l’on vous fasse. » Jésus-Christ pouvait-il marquer plus clairement combien il est nécessaire que nous accompagnions nos prières de nos bonnes œuvres et de notre vigilance ? Il ne dit pas : Tout ce que vous voulez que Dieu fasse pour vous, faites-le vous-même pour vos frères, afin que vous ne veniez pas dire : Comment cela se peut-il faire ? Il est Dieu ; et moi je suis homme. Mais il dit : Agissez envers vos frères comme vous voulez que vos frères, qui sont hommes comme vous, agissent envers vous. Qu’y a-t-il de plus doux et de plus juste que ce précepte ? Aussi il en fait voir l’excellence avant même que de parler de la récompense qui devait suivre. « C’est là toute la loi et les Prophètes. » On voit clairement par ces paroles que la vertu est conforme à la nature même : que nous avons au dedans de nous un maître qui nous apprend ce que nous devons faire ; et qu’ainsi nous ne pouvons nous excuser sur notre ignorance. « Entrez par la porte étroite, parce que la porte de la perdition est large, et le chemin qui y mène est spacieux, et il y en a beaucoup qui marchent par ce chemin (13). Que la porte de la vie est petite, et que le chemin qui y mène est étroit, et qu’il y en a peu qui « le trouvent (14) ! » Cependant Jésus-Christ dit dans la suite : « Mon joug est agréable, et mon fardeau est léger (Mt. 2,30) », et il a donné à entendre la même chose dans ce qui précède : Comment donc, dit-il ici, que cette porte est « petite », et que ce chemin est « étroit ? » Mais si vous pesez exactement ses paroles, vous reconnaîtrez, mes frères, qu’ici même il marque clairement que sa voie, quoiqu’étroite, ne laisse pas d’être douce et aisée. Vous demandez comment une voie si étroite, et une porte si petite peut être aisée. C’est parce que ce n’est qu’une « porte. » C’est parce que ce n’est qu’une « voie ; » de même que l’autre, quoique large et spacieuse, n’est aussi qu’une voie et qu’une porte. Car rien n’est stable ni permanent dans l’une et dans l’autre. Tout y passe également, et les biens de l’une disparaissent aussi vite que les maux de l’autre. Mais ce n’est pas cela seul qui nous rend le chemin de la vertu doux et agréable. C’est encore et surtout le terme auquel il aboutit. Ce qui excite et encourage davantage ceux qui s’y exercent, ce n’est pas seulement que ces peines et ces travaux ne font que passer ; mais qu’ils se terminent très heureusement à une vie qui