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Page:Jean Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 7, 1865.djvu/225

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ne suis pas digne que vous entriez dans ma maison (8). » Écoutons ces paroles, nous autres qui devons recevoir Jésus-Christ. Car il ne nous est pas impossible encore aujourd’hui de le recevoir chez nous. Écoutons ce centenier, mes frères, imitons sa foi, et estimons autant que lui la gloire de recevoir Jésus-Christ. Car lorsque vous retirez chez vous un pauvre qui meurt de froid et de faim, vous y retirez, et vous nourrissez Jésus-Christ même. « Mais dites seulement une parole, et mon serviteur sera guéri (8). » Ces paroles nous font voir que ce centenier, aussi bien que le lépreux, avait une haute idée de la toute-puissance du Fils de Dieu. Car il ne dit pas : Priez ou demandez, mais « commandez. » Et craignant ensuite que l’humilité de Jésus-Christ ne l’empêchât de consentir à sa demande, il ajoute : « Car moi qui ne suis qu’un homme soumis à la puissance d’un autre, et qui ai des soldats sous la mienne, je dis à l’un : Va, et il va, viens, et il vient ; et à mon serviteur, fais cela, et il le fait (9). » Mais vous direz peut-être que nous ne devons pas tirer une preuve de la divinité de Jésus-Christ des paroles de cet homme, mais considérer seulement si Jésus-Christ les a approuvées. Je reconnais que ce que vous dites est très-raisonnable, et c’est aussi ce que je vous prie d’examiner. Car si nous examinons avec soin ce qui se passe, nous remarquerons aisément, au sujet du centenier, ce que nous avons vu à propos du lépreux. Nous voyons que ce lépreux dit à Jésus-Christ : « Seigneur, si vous le voulez, vous pouvez me guérir. » Et cependant ce n’est pas tant la parole de cet homme qui nous assure de la toute-puissance de Jésus-Christ, que la réponse même du Sauveur, qui bien loin de reprendre la pensée que le lépreux avait de lui, la confirma au contraire en disant : « Oui, je le veux, soyez guéri. » Car ce « Oui, je le veux », eût été superflu, si Jésus-Christ n’eût voulu appuyer la vérité de cette parole : « Si vous le voulez, vous pouvez. » Nous pourrons voir ici la même chose dans le centenier. Il s’est servi d’une expression par laquelle il attribuait à Jésus-Christ plutôt la puissance d’un Dieu que celle d’un homme, et néanmoins non seulement Jésus-Christ ne l’en reprit pas, mais il l’approuva, et il releva sa foi avec de grandes louanges. Car l’Évangéliste ne se contente pas de dire simplement que Jésus-Christ loua le centenier ; mais ce qui est sans comparaison davantage, il dit qu’il « l’admira. » « Jésus entendant ces paroles fut dans l’admiration (10). » Et il ne fut pas seulement dans l’admiration de la foi de cet homme, mais il la proposa comme un modèle à tout le peuple qui l’environnait. Voyez-vous, mes frères, combien Jésus-Christ loue partout ceux qui reconnaissaient sa toute-puissance. Le peuple admirait sa manière de parler, parce qu’il « enseignait comme ayant autorité », et Jésus-Christ ne rejeta point cette pensée qu’ils avaient de lui, mais descendant avec eux de la montagne, il voulut la confirmer par la guérison du lépreux. Ce lépreux dit à son tour : « Seigneur, si vous le voulez, vous pouvez me « guérir. » Et Jésus-Christ ne réfuta point ses sentiments, mais les confirma en le guérissant, et en se servant même de ses propres termes : « Je le veux, soyez guéri. » De même le centenier ayant dit : « Dites seulement une « parole, et mon serviteur sera guéri », Jésus-Christ admira sa foi : « Et dit à ceux qui le suivaient : Je vous dis en vérité que je n’ai pas trouvé une si grande foi dans Israël même (10). »
2. Il est aisé de montrer la vérité de cette parole de Jésus-Christ en comparant le centenier avec ceux d’entre les Juifs qui ont eu plus de foi en lui. Marthe croyait au Sauveur ; et cependant elle ne dit rien qui approche de la foi de ces deux hommes. Au contraire elle lui parle d’une manière bien différente : « Je sais que Dieu vous accordera tout ce que vous lui demanderez. » (Jn. 11,22) Aussi Jésus-Christ non seulement ne la loua pas de cette parole, mais quoiqu’elle fût aimée particulièrement de lui, et qu’elle eût une grande affection et un grand zèle pour lui, il ne laissa pas de la reprendre, comme ayant exprimé des sentiments trop bas et trop indignes de lui. Car il lui répondit aussitôt : « Ne vous ai-je pas dit que si vous croyez vous verrez la gloire de Dieu ? « (Id) » l’accusant visiblement de n’avoir pas encore une véritable foi. Et pour mieux réfuter cette pensée qu’elle témoignait avoir de lui, en disant : « Je sais que Dieu vous accordera ce que « vous lui demanderez (Id) », il lui apprend qu’il n’avait pas besoin de rien recevoir d’un autre, et qu’il était lui-même la source de tous les biens : « Je suis », dit-il, « la résurrection et la vie », c’est-à-dire, je n’attends point cette puissance d’un autre ; mais je puis tout par moi-même.