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Page:Jean Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 7, 1865.djvu/235

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Remarquez ici le profond respect de saint Pierre pour son Maître. Quoiqu’il eût chez lui sa belle-mère malade d’une fièvre dangereuse, il ne le pria point de la venir voir. Il attendit qu’il eût achevé ce long discours de la montagne, et qu’il eût guéri tous les autres malades qui se présentaient à lui de toutes parts. C’est seulement lorsque le Seigneur entre dans le logis de l’Apôtre que celui-ci le prie enfin de guérir sa belle-mère. Tant il était instruit dès lors à préférer le bien des autres à ses propres intérêts
Ce n’est pas saint Pierre qui prie le Sauveur de tenir chez lui. C’est le Sauveur qui y vient de lui-même ; et un moment après que le centenier eut dit : « Je ne suis pas digne, Seigneur, que vous entriez chez moi, afin de témoigner jusqu’à quel point il voulait favoriser son disciple. Et quoiqu’il soit, aisé de juger quelles pouvaient être les maisons de ces pauvres gens qui n’étaient que des pêcheurs, Jésus-Christ néanmoins ne laisse pas d’aller clans ces cabanes, pour nous apprendre toujours à fouler aux pieds le faste et la vanité.
Il est remarquable que Jésus-Christ guérit quelquefois les malades par sa seule parole, quelquefois il étend sa main, quelquefois il joint les deux ensemble, pour rendre la guérison plus sensible Il ne voulait pas agir toujours si souverainement ; et si divinement dans ses miracles. Il avait besoin de se cacher pour un temps, principalement à l’égard de ses apôtres, de peur que l’excès de leur joie ne leur fît dire à tout le monde ce qu’il était. C’est pourquoi nous voyons qu’après s’être transfiguré devant eux sur la montagne du Thabor, il leur défendit de dire à qui que ce fût ce qu’ils avaient vu.
Il touche donc ici la main de cette femme malade, et non seulement il éteint l’ardeur de sa fièvre, mais il la rétablit même tout d’un coup dans une santé parfaite. Comme la maladie était tout ordinaire, il voulut au moins signaler sa puissance en la guérissant comme l’art des médecins n’aurait pu le faire. Vous savez en effet que, même après l’a cessation de la fièvre, il faut encore beaucoup de temps pour que les malades recouvrent toutes leurs forces. Mais ce double effet, Jésus-Christ l’opéra dans le même moment ; il fit quelque chose de semblable lorsqu’il apaisa la mer. Non seulement il arrêta les vents et la tempête, mais il calma soudain jusqu’au mouvement des flots, phénomène opposé aux lois de la nature, puisque, même après que la tempête a cessé, le mouvement qu’elle a imprimé aux ondes continue encore fort longtemps. La parole de Jésus-Christ fit donc en un instant ce que la nature ne fait que peu à peu. C’est encore ce qui arriva au sujet de cette femme, comme l’atteste l’Évangile « Elle se leva, » dit-il, « et les servit ; ce qui nous montre d’un côté la souveraine puissance de Jésus-Christ dans ses miracles, et de l’autre, la disposition de cette femme, et le grand zèle qu’elle avait pour Jésus-Christ.
Nous apprenons encore en ce miracle que Jésus-Christ accorde quelquefois la guérison de quelques personnes à la foi des autres. Car nous voyons ici que saint Pierre prie pour sa belle-mère, comme le centenier avait prié pour son serviteur. Ce n’est pas que Jésus-Christ dispensât ceux qu’il guérissait de croire en lui ; mais parce que ou l’âge encore trop tendre les empêchait de venir à lui, ou que l’ignorance où ils étaient ne leur permettait pas d’avoir de lui des sentiments assez relevés, il suppléait à ce qui manquait au malade parla foi de ceux qui priaient pour lui.
« Le soir étant venu, ils lui présentèrent plusieurs possédés et il chassa d’eux les malins esprits par sa parole, et guérit tous ceux qui étaient malades (16). Afin que cette parole du prophète Isaïe fût accomplie : Il a pris sur lui nos langueurs, et il s’est chargé de nos maladies (17). » Remarquez comme la foi de ce peuple s’est déjà accrue. La nuit même ne peut les porter à se retirer, et ils ne craignent point, d’importuner Jésus-Christ en lui amenant si tard leurs malades. Et je vous prie de considérer quelle foule de miracles les Évangélistes nous rapportent en un mot. Car ils ne s’arrêtent plus à rapporter chaque guérison en particulier ; mais ils en marquent comme en passant un nombre prodigieux. Et de peur que ce prodige ne parût incroyable à cause de sa grandeur même, puisqu’une multitude innombrable fut guérie en un moment de tant de différentes maladies, l’Évangéliste rapporte la parole du prophète Is. qui avait rendu témoignage si longtemps auparavant de ces merveilles qu’on voyait alors. Par là il nous apprend comme il fait partout ailleurs, qu’une preuve tirée des paroles de l’Écriture, n’a pas moins d’autorité qu’en ont les miracles. C’est dans cette vue qu’il rapporte cet endroit