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Page:Jean Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 7, 1865.djvu/272

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leurs égarements, mais ils s’opposaient même au progrès qu’ils auraient pu faire dans la vertu. Aussi nous voyons que lorsque le peuple, ravi des miracles de Jésus-Christ, publie hautement « qu’on n’a jamais rien vu de semblable dans Israël », les pharisiens crient au contraire : « Il chasse les démons par le prince des démons. »
3. « Alors il dit à ses disciples : Il est vrai que la moisson est grande, mais il y a peu d’ouvriers (37). Priez donc le maître de la moisson qu’il fasse aller les ouvriers à sa moisson (38). » Qui sont « ces ouvriers » dont Jésus-Christ parle en ce lieu, sinon ses douze disciples ? il dit « qu’ils sont peu, et néanmoins il n’y en ajoute point d’autres, et il les envoie sans en accroître le nombre. Pourquoi dit-il donc : « Priez le maître de la moisson qu’il fasse aller les ouvriers dans sa moisson », puisqu’il n’y en ajoute pas un seul lui-même ? C’est parce que, bien qu’ils ne fussent que douze, il sut les multiplier, non pas en augmentant leur nombre, mais en leur communiquant sa puissance et sa grâce. « Priez », dit-il, « le maître de la moisson. » Il leur apprend par ces paroles quelle est la grandeur du don qu’il leur doit faire, et il marque aussi obscurément qu’il est lui-même « le maître de cette moisson. » Puisqu’aussitôt qu’il leur a donné cet avis, sans qu’ils eussent prié personne, il les fait apôtres et les envoie prêcher, les faisant souvenir en même temps de ces paroles de saint Jean de « l’aire », du « van », de « la paille », et du « bon grain. » Ce qui montre clairement que c’est lui qui est le véritable laboureur, et qu’il est le maître de la moisson et des prophètes qui l’ont semée. Car en voyant ses apôtres recueillir la moisson, il est hors de doute qu’il ne les envoie pas recueillir la moisson d’un autre, mais celle qui était à lui, comme l’ayant lui-même semée par la prédication des prophètes. Mais il n’encourage pas seulement ses disciples, en leur représentant que leur travail est une moisson, mais en leur rendant encore ce travail facile. « Jésus ayant appelé ses douze disciples, leur donna puissance sur les esprits impurs pour les chasser et pour guérir toutes sortes de maladies et de langueurs (10, 1) » Cependant le Saint-Esprit n’avait pas encore été donné ; saint Jean le dit clairement : « Le Saint-Esprit n’était pas encore donné, parce que Jésus n’était pas encore glorifié. » (Jn. 7,39) Comment donc les apôtres pouvaient-ils chasser les démons, sinon par la puissance de Jésus-Christ, et par la vertu de la mission qu’il leur avait donnée ? Considérez aussi, mes frères, comme il ne les envoie que lorsqu’il est temps. Il ne les envoie point d’abord lorsqu’ils ne commençaient que de le suivre, mais après qu’ils ont été longtemps en sa compagnie, après, qu’ils l’ont vu ressusciter les morts, chasser les démons, commander à la mer, guérir les paralytiques et les lépreux, remettre les péchés ; enfin après les avoir suffisamment convaincus de sa toute-puissance par ses actions et par ses paroles, il leur dit alors : « Allez, je vous envoie. » Il ne les expose pas d’abord à de grands périls, puisqu’il n’y avait encore rien à craindre pour eux dans la Palestine, et qu’ils n’avaient qu’à se fortifier contre les injures et les médisances. Cependant il leur prédit de grands maux pour l’avenir, et il leur en parle sans cesse, afin qu’ils s’y préparent de bonne heure, et qu’ils soient plus fermes et plus courageux dans le péril.
Mais comme l’Évangéliste, n’avait encore parlé que de quatre apôtres, saint Pierre, saint André, saint Jacques et saint Jean et de saint Matthieu ensuite, sans avoir rien dit ni de la vocation, ni du nom même des autres, il rapporte ici leurs noms et leurs nombres. « Voici les noms des douze apôtres. Le premier, Simon, qui est appelé Pierre, et André son frère (2). » Il marque avec soin les noms et le pays des apôtres, parce qu’il y en avait deux qui s’appelaient Simon ; l’un Simon Pierre, et l’autre Simon le Chananéen ; comme il y en avait deux appelés Judas, dont l’un était le traître, et l’autre le frère de Jacques ; comme il y en avait aussi deux nommés Jacques l’un qui était fils d’Alphée, et l’autre, de Zébédée. Saint Marc en les nommant observe le rang et la dignité. Car après avoir nommé les deux chefs, il nomme en troisième lieu saint André. Mais notre Évangéliste nomine saint Thomas avant de se nommer lui-même, quoique saint Thomas lui fût de beaucoup inférieur.
Mais voyons cette liste jusqu’au bout. « Le premier est Simon, qui est appelé Pierre, et André, son frère. » Ce n’est pas là un petit éloge de saint Pierre, de le placer le premier à cause de sa vertu, et de lui joindre André,