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Page:Jean Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 7, 1865.djvu/317

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tiré cinq de ses disciples, puisque Philippe et les quatre autres, qui ont tenu le premier rang entre les apôtres, étaient tous de Bethsaïde. « Parce que si les miracles qui ont été faits chez vous, avaient été faits dans Tyr et dans Sidon, il y a déjà longtemps qu’elles auraient « fait pénitence dans le sac et dans la cendre (21). C’est pourquoi je vous déclare qu’au jour du jugement, Tyr et Sidon seront irritées moins rigoureusement que vous (22). « Et vous Capharnaüm, qui avez été élevée jusqu’au ciel, vous serez abaissée jusqu’au fond des enfers ; parce que si les miracles qui ont été faits au milieu de vous avaient été faits dans Sodome, elle se serait conservée jusqu’aujourd’hui (23). C’est pourquoi je vous déclare qu’au jour du jugement, Sodome sera traitée moins rigoureusement que vous (24). » Ce n’est pas sans sujet que Jésus-Christ parle ici de Sodome. Il veut par cette comparaison augmenter le crime de ces villes. Car il n’y avait point de plus grande preuve à donner de leur malice, que de les montrer pires que les cités les plus corrompues, non seulement qui étaient alors sur la terre, mais qui y eussent jamais été. Il condamne encore ailleurs les Juifs en rapportant l’exemple des Ninivites et de la reine de Saba. Mais au lieu qu’en cet autre endroit il les compare avec un peuple dont la conduite avait été très-louable, il les compare ici avec les plus corrompus des hommes, moyen beaucoup plus énergique d’exprimer la même pensée. Ézéchiel connaissait et pratiquait aussi ce mode de réprobation, lorsqu’il disait, s’adressant à Jérusalem : « Vous avez justifié vos sœurs criminelles par la grandeur de vos crimes (Ez. 16,2) ; » et on voit partout que Jésus-Christ se sert des mêmes expressions dont Dieu s’est servi dans la loi ancienne. Il ajoute ensuite : « C’est pourquoi je vous déclare qu’au jour du jugement Sodome sera traitée moins rigoureusement que vous (24). » Il augmente encore ici la frayeur qu’il leur avait inspirée auparavant, en disant qu’ils seront punis plus rigoureusement que ceux de Sodome et de Tyr. Ainsi il te sert d’un double moyen pour les toucher, en déplorant d’une part leur malheur extrême, et en leur représentant de l’autre la grandeur du supplice dont Dieu les menace.
5. Écoutons ceci, mes frères, Jésus-Christ ne menace pas seulement les incrédules de les traiter avec plus de sévérité que Sodome et que Gomorrhe. Il nous fait aussi la même menace, si nous ne recevons les hôtes qui viennent chez nous, lorsqu’il leur commande de « secouer contre nous la poussière de leurs pieds. » Et c’est avec grande raison qu’il nous châtiera ainsi. Car si les désordres de Sodome furent effroyables, il faut néanmoins observer qu’ils eurent lieu avant la loi de grâce. Mais à quels supplices nous exposons-nous, si après que Dieu a fait de si grandes choses pour nous sauver, nous sommes encore si éloignés d’exercer l’hospitalité, si nous n’ouvrons point nos maisons aux hôtes, si nous fermons même l’oreille pour ne point entendre leurs prières et leurs cris.
Mais pourquoi me plaindre de ce que vous n’écoutez pas les pauvres lorsqu’ils vous prient, puisque vous ne voulez pas écouter les apôtres même lorsqu’ils vous parlent, et que c’est pour cela même que vous n’écoutez point les pauvres ? Saint Pan ! vous parle dans ses épîtres, lorsqu’on le lit ici devant tout le monde. Saint Jean vous prêche dans son Évangile, et vous ne daignez écouter ni l’un ni l’autre. Et après cela nous étonnerons-nous que vous soyez sourds aux cris des pauvres, puisque vous l’êtes à la voix des apôtres mêmes ? Afin donc que nos maisons soient toujours ouvertes aux pauvres, et l’oreille de nos cœurs aux instructions des apôtres, purifions-les de tout ce qui les souille et qui les rend sourds. Car de même que l’oreille du corps, si elle est remplie de terre et de boue, ne peut pins entendre, ainsi l’oreille de notre cœur devient sourde, lorsqu’elle est remplie de chansons impudiques, des fables et des vains discours du monde ; des inquiétudes que causent les dettes, et du soin d’amasser de l’argent par des usures. Toutes ces choses ne bouchent pas seulement les oreilles du cœur, mais elles les souillent plus que ne pourraient faire les choses les plus immondes. C’est le sens de la parole de ce barbare qui menaçait le peuple de Dieu, en lui disant : Vous mangerez vos propres excréments. Voilà l’indignité que vous font endurer ces chanteurs que vous allez entendre au théâtre, non plus seulement en paroles, mais par les effets ; ou plutôt, ce qu’ils vous font est encore pire, puisqu’il n’y a pas d’ordures aussi dégoûtantes que leurs chansons lubriques. Et cependant lorsque les comédiens les récitent devant vous, non seulement vous n’en avez pas de la peine, mais vous en riez, vous vous