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Page:Jean Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 7, 1865.djvu/329

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Celui qui est ici est plus grand, que le temple (6). » J’admire que les Juifs entendant cette parole n’en sont point irrités. C’était peut-être parce qu’elle n’était point accompagnée de miracles et de la guérison de quelque malade. Cependant comme elle, pouvait leur paraître dure, il la couvre aussitôt et détourne son discours ailleurs en leur disant avec quelque force ! « Que si vous entendiez bien cette parole : J’aime mieux la miséricorde que le sacrifice, vous n’auriez pas condamné, des innocents. (7) ». (Os. 6) Il diversifie son discours. Il fait voir tantôt que ses apôtres méritent qu’on les excuse et tantôt qu’ils n’ont rien fait dont on les puisse accuser : « Vous n’auriez pas », dit-il, « condamné des innocents » Il avait déjà fait voir par la comparaison des prêtres que ses disciples n’étaient point coupables, mais il l’assure ici de son autorité propre qu’il appuie néanmoins sur la loi, en rapportant le passage du prophète Enfin, après tant de raisons, il finit par cette dernière.
3. « Car le Fils de l’Homme est maître du sabbat même (8) » Ce qu’il entend de lui-même, quoique saint Marc témoigne que cette parole a été dite en général de tous les hommes. Car il dit « Le sabbat est fait pour l’homme et non l’homme pour le sabbat ». Si cette parole est vraie, me direz-vous, pourquoi celui qui ramassait du bois le jour du sabbat en fut il puni ? Je vous réponds que Dieu usa alors de cette rigueur, parce que s’il eut laissé violer impunément cette loi aussitôt qu’elle fut faite, on ne saurait point garder ensuite. L’observation du sabbat était d’abord très avantageuse aux hommes Elle leur apprenait a être doux et charitables les uns envers les autres, et les instruisait de la sagesse et de la providence de Dieu dans la conduite du monde, comme le témoigne Ézéchiel. (Ez. 20,6) Elle les avertissait de se séparer au moins pour un peu de temps de leurs dérèglements et de leurs péchés, et de s’appliquer aux choses spirituelles. Si Dieu, en donnant cette loi aux Juifs, leur eut dit Vous pourrez vous appliquer à quelque bon ouvrage au jour du sabbat, mais vous ne ferez en ce jour rien de ce qui sera mauvais, ils n’eussent pu s’empêcher de travailler. C’est pourquoi il leur dit absolument : Ne faites aucun ouvrage en ce jour ; et ils ne peuvent pas même ainsi se soumettre à cette loi. Mais Dieu a fait assez voir, en l’établissant, qu’il ne désirait autre chose des Juifs, sinon qu’ils s’abstinssent de faire le mal : « Vous n’y ferez rien », dit-il, « excepté les ouvrages qui sont propres à « l’âme. » Car dans le temple tout se passait ce jour-là comme les autres jours : on y travaillait même beaucoup plus que les autres jours, Et ainsi Dieu découvrait dès lors à ce peuple par des ombres et des figures la lumière de sa vérité.
Jésus-Christ donc, me direz-vous, a-t-il voulu abolir une loi qui était si utile ? À Dieu ne plaise ! Bien loin de l’abolir, il l’a étendue encore plus loin. Le temps était venu d’instruire les hommes de toutes les vérités, et d’une manière plus sublime et plus élevée. Il ne fallait plus que ces ordonnances légales liassent les mains à un homme qui, étant délivré et affranchi du péché, courait avec ardeur dans la voie de Dieu. Ce n’était plus le temps d’apprendre seulement par l’observation du sabbat que Dieu était le maître et le créateur da toutes choses, ni de se servir de cette considération pour être plus doux et plus humain, lorsque les hommes étaient invités à se rendre les imitateurs de la charité infinie de Dieu même : « Soyez », dit-il, « miséricordieux comme votre Père céleste est miséricordieux. » (Lc. 6,22) Il ne fallait plus non plus nous ordonner de célébrer seulement un jour de la semaine, puisque Dieu nous commande maintenant de ne faire de toute notre vie qu’une seule fête : « Célébrons une fête », dit saint Paul, « non pas dans le vieux levain, ou dans le levain de la malice ou de la corruption, mais avec les pains purs de la sincérité et de la vérité. » (1Cor. 5,7) Pourquoi commander de passer le jour auprès de l’arche de Dieu et de l’autel d’or, à ceux qui deviennent eux-mêmes le temple de Dieu, qui l’ont toujours présent dans eux et qui s’entretiennent sans cesse avec lui par leurs prières, par leurs sacrifices, par la lecture de sa parole et par la pratique de l’aumône et des bonnes œuvres ? Enfin de quoi servirait l’observation du jour du sabbat à celui qui passe sa vie dans une fête qui ne finit point, et dont la conversation est toujours dans le ciel ?
Célébrons, mes frères, ce sabbat céleste et continuel, et abstenons-nous de toute œuvre servile et mauvaise Appliquons-nous de plus en plus à des choses divines et spirituelles, et séparons-nous de tout ce qui est humain et