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Page:Jean Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 7, 1865.djvu/330

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terrestre : entrons comme dans un saint repos, dans une inaction et une oisiveté bienheureuse, empêchant nos mains de se prêter à l’avarice et tout notre corps de s’employer à des travaux vains et inutiles, semblables à ceux où s’occupaient autrefois les Juifs en Égypte.
Car lorsque nous amassons évidemment de l’or, nous ne différons en rien de ces Hébreux que des maîtres cruels tenaient attachés à la boue et à la paille qu’ils travaillaient sous le fouet, et dont ils faisaient de la brique. Le démon oblige encore aujourd’hui à ces mêmes ouvrages et avec la même barbarie que Pharaon autrefois y forçait les Juifs. Car qu’est autre chose l’or et l’argent sinon de la terre et de la paille ? L’argent n’allume pas moins la passion et l’avarice que la paille n’allume le feu, et il ne salit pas moins notre âme que la boue notre corps. C’est pourquoi Dieu nous a donné un Sauveur, non en nous envoyant Moïse du fond d’un désert, mais son Fils même du haut du ciel. Si après cela vous demeurez encore en Égypte, vous serez enveloppé dans le malheur des Égyptiens. Mais si vous y renoncez pour être du nombre des véritables Israélites, vous verrez toutes les merveilles que Dieu fera en votre faveur.
4. Ce n’est pas que cette seule retraite vous suffise pour le salut. C’est peu que de sortir de l’Égypte, si l’on n’entre dans la terre promise. Les Juifs, comme dit saint Paul, ont tous passé la mer Rouge, ils ont mangé la manne, ils ont bu un breuvage spirituel, et néanmoins ils n’ont pas laissé de périr. De peur donc que ce mal-heur ne nous arrive, ne soyons point lâches et paresseux. Quand il y aurait encore aujourd’hui des personnes dangereuses comme ces espions d’autrefois qui rendraient suspecte la vie évangélique, et qui décrieraient la voix étroite en la représentant comme trop rude et trop pénible, n’imitez point la lâcheté de ce peuple juif, qui se laissa abattre par ces faux rapports, mais le zèle de Josué et de Caleb, et ne les quittez point jusqu’à ce que vous soyez entré avec eux dans la véritable terre promise. Ne craignez point toute la peine et tous les périls qui peuvent se rencontrer dans ce chemin. Lorsque nous étions ennemis de Dieu, il nous a réconciliée avec lui nous abandonnera-t-il après nous avoir rendus ses amis ?
Vous me direz peut-être que cette voie que je vous propose est bien étroite et bien difficile. Et moi je vous réponds que celle où vous marchiez auparavant était bien plus dure et plus pénible. Elle n’était pas seulement étroite et resserrée, mais pleine de ronces et d’épines, et infestée par un grand nombre de bêtes farouches. Comme il était impossible aux Égyptiens de passer la mer, si Dieu ne l’eût ouverte par un grand miracle, il nous est impossible de même de passer de notre première vie à une vie sainte et céleste, à moins que le Sauveur ne nous ouvre les eaux salutaires du baptême. Si Dieu a bien pu faire alors que ce qui était entièrement impossible devînt possible, il pourra bien faire maintenant que ce qui est difficile devienne facile.
Mais cette merveille qui se fit alors, me direz-vous, était purement l’ouvrage de la grâce et de la bonté de Dieu. C’est ce qui vous doit donner plus de confiance. Car si les Juifs alors, sans contribuer en rien de leur part, ont surmonté de si grandes difficultés par la seule miséricorde de Dieu, que ne devez-vous point espérer, lorsque vous tâcherez de joindre votre travail et vos efforts au secours et à l’opération de la grâce ? S’il a sauvé ceux qui étaient lâches et paresseux, abandonnera-t-il ceux qui agissent et qui travaillent ?
Nous vous avons exhortés, jusqu’à cette heure, à avoir confiance en Dieu, dans ce qui vous paraîtra rude et pénible, en considérant qu’il a fait autrefois des choses entièrement impossibles ; mais je vous dis maintenant que si nous sommes vraiment sages, ce que nous appréhendions tant ne nous paraîtra plus difficile. Car considérez combien Jésus-Christ nous a aplani la voie. La mort a été foulée aux pieds ; le démon a été terrassé ; la domination du péché a été détruite ; la grâce du Saint-Esprit a été donnée ; toutes ces ordonnances si pénibles de la loi ont été abolies, et la vie même, qui est le temps du travail, a été réduite à fort peu d’années.
Et pour vous faire voir par des preuves effectives combien tout ce que Dieu nous demande est léger, voyez combien de personnes sont allées même au-delà des commandements de Jésus-Christ. Et après cela vous craignez des ordonnances si douces et si modérées ? Quelle excuse donc restera-t-il à votre lâcheté, si lorsque les autres courent avec joie au-delà même des bornes prescrites, vous perdez courage avant que d’y arriver ? Nous avons peine à