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Page:Jean Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 7, 1865.djvu/349

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nous négligeons notre âme, lorsqu’elle est accablée de tant de maux. Quand la purgerons-nous de toutes ces 1m puretés dont nous la souillons chaque jour ? Quand couperons-nous toutes ces ronces et ces épines ? Quand y répandrons-nous la semence des vertus ?
Ne savez-vous pas que le temps de la moisson approche ? et cependant nous n’avons pas encore commencé à défricher la terre qui nous a été commise. Que si le maître du champ nous surprend dans cette paresse, que lui dirons-nous, que lui pourrons-nous répondre ? Dirons-nous que personne ne nous a donné de semence ? On a soin de le faire tous les jours. Dirons-nous que personne n’a arraché les épines qui couvraient toute la terre. Nous tâchons à tous moments d’y mettre cette faux » dont il est parlé dans l’Écriture. Nous excuserons-nous sur les nécessités de la vie qui nous attachent et qui nous tiennent comme captifs ? Pourquoi ne vous Êtes-vous pas « crucifié au monde ? » selon la parole de l’Apôtre.
Si celui qui n’a rendu que le talent qu’il avait reçu de son maître, est appelé « méchant serviteur », parce qu’il ne l’a pas rendu au double, comment appellera-t-on celui qui aura même dissipé ce qu’on lui aura donné ? Si ce serviteur fut lié et précipité dans le lieu « des s pleurs et des grincements de dents ; » que souffrirons-nous, nous autres qui demeurons toujours lâches et paresseux, quoique tant de considérations nous portent à nous convertir ?
Car qu’y a-t-il en ce monde qui ne vous dût aider à penser à Dieu ? Ne voyez-vous pas combien la vie est fragile et incertaine, et de combien de maux et d’afflictions elle est traversée ? Ne croyez pas, je vous supplie, qu’il n’y ait que la vertu qui soit pénible. Le vice a aussi ses épines et ses travaux. Puis donc que le travail est égal de part et d’autre, pourquoi n’embrassez-vous pas plutôt celui qui sera suivi d’une si grande récompense ?
Il y a même des vertus qui s’exercent sans aucune peine. Car quelle peine y a-t-il à ne point médire, à ne point mentir, à ne point jurer, à ne se point mettre en colère contre son frère ? S’il y a de la peine, ce n’est pas à fuir ces vices, mais à les commettre. Ne serons-nous donc pas inexcusables, et indignes de pardon, si nous ne nous appliquons pas à ces vertus mêmes qui sont si faciles ? Et qui s’étonnera que nous n’arrivions jamais à ce qu’il y a de plus élevé et de plus pénible dans la vertu, puisqu’en négligeant les choses les plus aisées, nous nous rendons incapables des plus grandes ?
Souvenons-nous, mes frères, de ces avis si importants ; fuyons le mal, embrassons la vertu, afin de jouir et du vrai bonheur de cette vie, et dans l’autre des biens éternels que je vous souhaite, par la grâce et par la miséricorde de Notre-Seigneur Jésus-Christ. Ainsi soit-il.