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Page:Jean Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 7, 1865.djvu/425

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tous les jours devant vos yeux ;? Je ne les appelle petites que parce qu’elles n’ont pas tant d’éclat à l’extérieur, quoique leur vertu invisible soit incomparablement plus grande que tous ces prodiges de l’air. Car que peut-on comparer à la puissance de remettre les péchés, de ressusciter les morts, de chasser les démons, de rendre la santé, le mouvement et l’affermissement aux corps, et de faire cent autres choses semblables ?
« Ce peuple méchant et adultère demande un prodige, et il ne lui en sera point donné d’autre que celui du prophète Jonas. Et les laissant là, il s’en alla (4). » Voyez combien leurs cœurs sont aveuglés. Jésus-Christ leur dit qu’il ne, leur sera point donné d’autre signe que celui du prophète Jon. et ils ne s’informent, pas même quel était ce signe : Ne devaient-ils pas, eux qui savaient quel avait été ce prophète, et ce qui lui était arrivé, chercher au moins, lorsqu’on leur disait cette parole pour la seconde fois, s’éclaircir de ce qu’elle voulait dire, et à se faire instruire de ce mystère ? Mais ce que j’ai dit n’est que trop vrai. Ils ne faisaient point ces questions au Sauveur dans un désir sincère de s’instruire. C’est pourquoi l’Évangile remarque « que Jésus-Christ les laissa et qu’il s’en alla. »
« Or ses disciples étant passés au-delà de l’eau, oublièrent de prendre des pains (5). Et Jésus leur, dit : Ayez soin de vous garder du levain des pharisiens et des sadducéens (6). » Pourquoi Jésus-Christ ne leur dit-il pas clairement. Ayez soin de vous garder de la doctrine des pharisiens ? Il est clair que par cette expression, il voulait leur donner lieu de se souvenir des deux miracles qu’il avait faits, car il savait qu’ils ne s’en souvenaient déjà plus. Il n’eût pas été raisonnable de leur reprocher cet oubli s’il n’en eût trouvé un sujet légitime, mais en prenant ainsi l’occasion d’eux-mêmes et de ce qu’ils disent pour leur faire ce reproche, c’était sans doute un moyen de l’a doucir beaucoup, et de le leur rendre moins odieux.
Vous me direz peut-être : Pourquoi ne prenait-il pas sujet de les blâmer de cet oubli, lorsqu’ils lui dirent au second, miracle : « Où pourrons-nous avoir dans, ce désert assez-de pain pour nourrir un si grand nombre de personnes ? » Il semblait que ce fût alors une occasion bien propre de les accuser de leur peu de souvenir. Je vous réponds qu’il ne voulut pas le faire alors, pour ne pas paraître faire avec quelque faste ce second miracle. On peut dire aussi qu’il évita de leur faire alors ce reproche, parce qu’il ne voulait pas les confondre devant le peuple, ni chercher sa gloire dans leur propre confusion. De plus cette accusation était beaucoup plus juste ici, puisque ce miracle opéré par deux différentes fois, avait produit sur eux si peu d’effet. Mais enfin, après cette seconde multiplication, il ne diffère plus d’accuser leur peu de foi, et il découvre en public les pensées qu’ils formaient dans le secret de leur cœur. « Mais ils pensaient et disaient entre eux : C’est parce que nous n’avons point pris de pain (7). » Il paraît qu’ils étaient encore attachés aux cérémonies, de la purification des Juifs, et du discernement des viandes. Toutes ces raisons réunies obligent Jésus-Christ de les reprendre avec plus de force. « Ce que Jésus connaissant, il leur dit : Hommes de peu de foi, pourquoi vous entretenez-vous ensemble de ce que vous n’avez point pris de pains (8) ? »Ne comprenez-vous point encore et ne vous souvenez-vous point ? Votre cœur est – il aveuglé ? Avez-vous des yeux sans voir et des oreilles sans entendre ? Ne vous souvenez-vous point des cinq pains distribués à cinq mille hommes, et combien vous en avez remporté de paniers (9) ? Ni des sept pains distribués à quatre mille hommes, et combien vous en avez remporté de corbeilles (10) ? »
Remarquez, mes frères, avec quelle sévérité le Sauveur parle ici à ses apôtres. On ne voit point ailleurs qu’il leur ait rien reproché avec tant de force. D’où vient donc qu’il les traite ici si sévèrement ? C’était encore pour les porter à laisser de côté l’observance concernant la distinction des viandes. Il s’était contenté, lorsqu’il en parlait aux pharisiens, de dire à ses apôtres qui l’interrogeaient : « Ne comprenez-vous point cela ? Êtes-vous aussi sans intelligence ? » Mais il leur parle ici plus fortement et il les appelle des hommes de peu de foi. » Il n’est pas toujours à propos de parler doucement aux hommes. Si d’un côté il leur donnait beaucoup d’accès et de liberté auprès de lui, i1 savait aussi de l’autre les corriger par de sévères réprimandes, afin que par ce mélange et ce tempérament de sévérité et de douceur, il ménageât avec sagesse la conduite de leur salut.
Il semble qu’aussitôt qu’il leur a fait ce reproche, il veuille s’en justifier en disant : « Ne