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Page:Jean Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 7, 1865.djvu/438

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HOMÉLIE LV.


« ALORS JÉSUS DIT A SES DISCIPLES SI QUELQU’UN VEUT VENIR APRÈS MOI, QU’IL RENONCE À SOI-MÊME, QU’IL SE CHARGE DE SA CROIX, ET QU’IL ME SUIVE. » (CHAP. 16,24, JUSQU’AU VERSET 28)

ANALYSE.

  • 1. Précepte du renoncement à soi-même ; en quoi il consiste.
  • 2 et 3. Porter sa croix et suivre Jésus-Christ pour arriver au salut, à la vie, aux récompenses éternelles.
  • 4. À quoi sert la santé du corps si l’âme est malade ? – Le Père et le Fils ont la même substance comme la même gloire.
  • 5 et 6. Éloge des solitaires et de leur genre de vie. – Leur formule de prière. – Les gens du monde pourraient et devraient imiter les solitaires.


1. « Jésus dit alors à ses disciples », c’est-à-dire lorsque saint Pierre lui eut dit : « A Dieu ne plaise, Seigneur, cela ne vous arrivera pas », et que Jésus-Christ eut répondu : « Retirez-vous de moi, Satan ; » car le Fils de Dieu ne se contenta pas d’une réprimande si sévère. Il voulut faire voir quelle était la vanité des paroles de cet apôtre, et quel serait le fruit, au contraire, que tout le monde tirerait de sa passion. Vous m’exhortez, lui dit-il, à avoir pitié de moi-même et vous désirez que ces souffrances ne m’arrivent pas ; et moi je vous dis au contraire que non seulement il vous serait très-dangereux de vous opposer à ma croix et d’empêcher que je ne meure pour vous, mais que vous périrez très-certainement et que vous ne pourrez prétendre aucune part au salut, si vous n’êtes disposé vous-même aux souffrances et toujours prêt à la mort. Il veut que ses disciples reconnaissent qu’il n’était pas indigne de lui de mourir en croix et de mourir non seulement pour les raisons qu’il leur avait déjà dites, mais encore pour les grands avantages que sa mort produirait pour toute la terre. Il dit dans l’Évangile de saint Jean « Que si le grain de froment ne meurt lorsqu’il est en terre, il demeure seul, mais qu’après qu’il est mort il rapporte beaucoup de fruit. (Jn. 19,24)
Et pour étendre encore cette vérité plus loin, dans cet endroit de saint Matthieu, il montre que non seulement il faut qu’il meure lui-même, mais que tous ses véritables disciples s’y doivent aussi préparer. Il y a, leur dit-il, tant de biens renfermés dans ces souffrances passagères, qu’un de vos plus grands malheurs c’est de ne les vouloir pas accepter et de craindre de mourir ; comme votre plus grand bonheur, c’est d’être toujours prêts à faire ce sacrifice. C’est ce qu’il montre clairement par toute la suite, quoique jusque-là il n’eût voulu découvrir cette vérité qu’en partie.
Et remarquez, mes frères, la sagesse avec laquelle Jésus-Christ parle en cet endroit. Il n’engage et ne force personne. Il ne dit point : Quoique vous le vouliez, ou que vous ne le vouliez pas, il faut nécessairement que vous enduriez des maux. Il dit seulement : « Si « quelqu’un veut venir après moi. » Je ne contrains et ne violente personne. Je laisse tout le monde à soi et libre de faire ce qu’il voudra. C’est pourquoi je dis : « Si quelqu’un veut. » Car c’est à des biens que je vous invite et non à des maux. Je ne vous appelle point à un état de misères ni aux rigueurs d’un supplice pour user envers vous de contrainte. Les biens que je vous propose sont assez grands pour vous attirer d’eux-mêmes à écouter ce que je vous dis. Mais ces paroles formaient l’exhortation la plus puissante qu’il pût employer. Celui qui violente et qui force quelqu’un, lui donne souvent de l’éloignement et augmente son aversion, Lorsqu’au contraire on laisse celui à