Aller au contenu

Page:Jean Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 7, 1865.djvu/497

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

de l’envie. C’est une passion impudente audacieuse. Elle ne se rebute jamais. Après avoir été cent fois repoussée, elle revient et elle nous attaque tout de nouveau. Mais remarquez, je vous prie, avec quel artifice ils font cette question à Jésus-Christ. Ils ne lui disent point : Vous nous avez déjà commandé de ne point répudier nos femmes, ce qu’il avait fait dans le sermon sur la montagne. Ils ne le font point souvenir de cette défense, afin de le surprendre plus adroitement, et de l’envelopper dans une contradiction manifeste. Ils ne lui disent point : Vous nous avez ordonné telle et telle chose, mais, dissimulant qu’il leur eût jamais parlé sur ce sujet, ils demandent avec une grande apparence de simplicité, s’il était permis de répudier sa femme, croyant qu’il aurait oublié ce qu’il leur avait dit autrefois. Ils se tenaient prêts, s’il eût dit que cela était permis, à le réfuter par lui-même et à lui objecter la défense qu’il en avait faite, ou, s’il demeurait dans le même sentiment, de le décrier comme contraire a Moise.
Que fait donc Jésus-Christ ? Il ne leur dit point : « Hypocrites, pourquoi me tentez-vous » ? quoiqu’il leur fit ce reproche ailleurs, mais il l’évite ici, afin de leur faire voir une souveraine humilité dans une souveraine puissance. Il observait en ces occasions de ne pas demeurer toujours dans le silence, de peur qu’ils ne s’imaginassent qu’il ne connaissait pas leurs mauvais desseins ; et il ne le reprenait pas non plus toujours, pour nous apprendre à souffrir avec douceur toute la malignité de nos adversaires. Que leur répond-il donc ? « N’avez-vous point lu que celui qui fit l’homme au commencement, les fit mâle et femelle (4) ; et qu’il dit : pour cette raison, l’homme abandonnera son père et sa mère, et il demeurera attaché à sa femme, et ils ne feront tous deux qu’une seule chair (5). Ainsi ils ne sont plus deux, mais une seule chair. Que l’homme donc ne sépare pas ce que Dieu a joint (6) ». Considérez, mes frères, la sagesse du Sauveur. Lorsqu’on l’interroge si le divorce était permis, il ne répond pas d’abord que non, pour ne leur pas donner lieu de se récrier tout d’un coup, et d’exciter centre lui du bruit et du tumulte. Il prévient sa réponse par l’autorité de l’Écriture et montre que sa loi était conforme à celle que Dieu son Père avait établie dès le commencement du monde ; et que ce n’était pas pour contredire Moïse qu’il enseignait ces choses. Et remarquez qu’il n’autorise pas seulement cette vérité par la création de l’homme et de la femme, mais encore par le commandement de Dieu même. Car il ne dit pas seulement Dieu n’a fait qu’un seul homme et qu’une seule femme ; mais encore il a commandé qu’un homme n’épousât qu’une seule femme. S’il eût voulu qu’un homme eût plusieurs femmes, après avoir fait l’homme, il ne se fût pas contenté de ne lui faire qu’une femme, mais il en eût créé plusieurs. Ainsi Dieu autrefois a montré clairement, par la création de l’homme et par la loi qu’il lui donna d’abord, qu’on ne doit avoir qu’une femme, et que l’union du mariage ne doit jamais être rompue. « Celui qui fit l’homme au commencement, les fit mâle et femelle » ; c’est-à-dire, qu’ils sortirent d’un même principe, et qu’ils se réunirent dans un même corps. « Car ils ne feront tous deux qu’une seule chair ».
Il frappe ensuite de terreur ceux qui oseraient blâmer ou contredire cette loi, et il l’affermit davantage en ne disant pas simplement : ne rompez donc pas le mariage ; ne séparez donc pas cette union, mais, que l’homme « donc ne sépare pas ce que Dieu a joint ». Que si vous m’objectez l’autorité de Moïse, je vous allègue celle du Maître de Moïse ; et je m’établis sur une autorité plus puissante et plus ancienne que la vôtre. Car « Dieu créa au commencement un homme et une femme ». Quoiqu’il semble donc que je sois maintenant l’auteur de cette loi, vous voyez combien elle est ancienne, et qu’elle a été très religieusement établie dès le commencement du monde. Car Dieu, ne s’est pas contenté de dire qu’un homme prendra une femme mais « qu’il abandonnera son père et sa mère », non pour s’unir simplement avec sa femme, mais pour s’y attacher d’un lien si étroit « qu’ils ne fassent plus tous deux qu’une seule chair ».
2. Après qu’il a ainsi proposé la première et la plus ancienne loi, fondée dans la nature même, dans les paroles et dans la conduite du Créateur, il interprète avec autorité la loi de Moïse, en établissant la sienne : « Ils ne sont plus deux », dit-il, « mais une seule chair ». Comme donc c’est un crime que de diviser en même corps : c’en est un de même de diviser le mari d’avec la femme. Et sans s’en tenir là, il autorise encore ce qu’il a dit par le respect