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Page:Jean Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 7, 1865.djvu/498

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et la crainte qu’on doit à l’ordre de Dieu : « Que l’homme », dit-il, « ne sépare pas ce que Dieu a joint » : montrant que le divorce était, également contre la loi de Dieu et contre celle de la nature ; contre l’ordre de la nature, parce qu’il séparait une même chair ; et contre l’ordre de Dieu, parce qu’après que Dieu a commandé à l’homme de ne point séparer ce qu’il avait joint, vous n’avez pas laissé de le séparer.
Après des paroles si sages, les Juifs ne devaient-ils pas garder le silence et admirer cette réponse ? Ne devaient-ils pas être frappés d’étonnement en voyant une si grande uniformité de doctrine entre Jésus-Christ et son Père ? Cependant ils sont bien éloignés d’une modération si équitable. Ils entreprennent au contraire d’attaquer le Sauveur d’une autre manière. Ils lui disent : « Pourquoi donc Moïse a-t-il ordonné qu’un homme pût renvoyer sa femme en lui donnant un écrit par lequel il déclare qu’il l’a répudiée (7) » ? Quoique Jésus-Christ pût faire plus raisonnablement cette objection aux Juifs, que les Juifs ne la lui faisaient à lui-même, il ne refuse pas néanmoins de leur répondre ; et sans leur dire que cela ne le regardait point, et qu’il n’était point responsable de ce qu’avait ordonné Moïse, il veut bien satisfaire à leur demande. S’il avait été ennemi de l’ancien Testament, comme le disent quelques hérétiques, il ne se serait pas ainsi mis en peine de justifier Moïse il n’aurait pas entrepris d’autoriser tout ce qui s’était fait dans ces premiers temps ; et il n’aurait pas tant affecté de faire voir que tout ce qu’il enseignait avait un rapport et une union parfaite avec la loi de Moïse. Mais pourquoi les pharisiens choisissent-ils ce qui concerne le mariage pour opposer Moïse à Jésus-Christ, au lieu de choisir les observances si nombreuses instituées par Moïse touchant les viandes et les sabbats ? – C’est parce qu’ils voulaient exciter contre Jésus-Christ tous les hommes. Car pour les Juifs le divorce était une chose indifférente ; ils en usaient sans scrupule. Aussi, de tous les commandements promulgués par Jésus-Christ dans le sermon sur la montagne, c’est celui-ci qu’ils choisissent de préférence pour lui tendre un piège. Mais la sagesse infinie du Sauveur sait bien trouver le moyen d’excuser Moïse.
« Moïse vous a permis de quitter vos femmes, à cause de la dureté de votre cœur (8) ». Il ne veut laisser aucun sujet d’accuser Moïse. Comme ce prophète avait établi cette loi par l’ordre de Dieu, Jésus-Christ le justifie, et il fait retomber sur les Juifs mêmes la nécessité inévitable où Moïse était de la publier. C’est une conduite dont il use presque partout. Lorsque les pharisiens accusaient ses disciples d’arracher des épis de blé, il montre à ses accusateurs si sévères que si ses disciples étaient coupables, ils l’étaient aussi eux-mêmes. Quand ces mêmes ennemis les blâmaient de ne point laver leurs mains en se mettant à table, et de violer ainsi la loi, il leur fait voir que c’était au contraire eux-mêmes qui la violaient. Il fait la même chose dans l’accusation du violemment du sabbat. C’est ce qu’il fait encore ici et presque dans toutes les rencontres semblables. Mais comme ce qu’il venait de dire pouvait paraître un peu fort, et donner lieu à ces hommes d’accuser le Sauveur de les traiter avec trop de dureté, il reprend aussitôt son premier discours de l’ancienne loi de Dieu.
« Il n’en a pas été ainsi dès le commencement (8) ». C’est-à-dire, Dieu vous a donné une loi toute contraire par l’état même dans lequel il a créé l’homme. Il semble qu’il prévienne cette objection qu’ils lui pouvaient faire. D’où savez-vous que « Moïse n’a fait cette loi qu’à cause de la dureté de notre cœur » ? Il veut encore une fois les réduire au silence sur ce point. Car si cette loi de Moïse eût été la plus considérable et la plus naturelle, Dieu n’en aurait pas établi dès le commencement du monde une autre qui lui est tout opposée. Il n’aurait pas créé l’homme avec une seule femme, et il n’aurait pas dit, qu’ils ne seraient tous deux qu’une seule chair ».
« Aussi je vous déclare que quiconque quitte sa femme, si ce n’est en cas d’adultère, et en épouse une autre, commet l’adultère ; et que celui qui épouse celle qu’un autre a quittée, commet l’adultère (9) ». Après les avoir ainsi confondus, il leur parle ensuite avec plus d’autorité. Il avait déjà gardé la même conduite, en parlant du discernement des viandes et de la violation du sabbat. Car, après avoir réfuté toutes leurs raisons sur le discernement des viandes, il appelle enfin ses disciples, et leur dit : « Ce n’est pas ce qui entre dans l’homme qui le rend impur ». (Mt. 15) Après avoir parlé sur le violemment du sabbat, il conclut ensuite : « Il est donc permis de faire du bien le jour du sabbat ».
Ainsi il garde partout la même conduite. Mais