Aller au contenu

Page:Jean Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 7, 1865.djvu/512

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

ses apôtres, et leur avoir inspiré une sainte confiance, et pour eu-mêmes et pour le reste des hommes, il ajoute aussitôt : « Plusieurs de ceux qui auront été les premiers, seront les derniers ; et plusieurs de ceux qui auront été « les derniers, seront les premiers (30) ». Cette sentence, quoique générale et dite pour tout le monde, se peut particulièrement entendre des pharisiens qui persistèrent jusqu’à la fin dans leur incrédulité. Et ceci a rapport à ce qui est dit ailleurs : « Que plusieurs viendraient de l’Orient et de l’Occident pour être dans le bienheureux sein d’Abraham, d’Isaac et de Jacob, mais que les enfants du royaume seraient jetés dehors ». (Mt. 8,11) Jésus-Christ ajoute ensuite une parabole qui est d’une extrême consolation pour ceux qui ne se sont convertis que tard. « Le royaume des cieux est semblable à un père de famille qui sortit dès la pointe du jour afin de louer des ouvriers pour travailler à sa vigne. (Chap. 20,1) Et étant demeuré d’accord avec les ouvriers qu’ils auraient un denier pour leur journée, il les envoya à sa vigne (2). Étant sorti sur la troisième heure du jour et en ayant vu d’autres qui se tenaient dans la place sans rien faire.(3), il leur dit : Allez-vous-en aussi vous autres dans ma vigne, et je vous donnerai ce qui sera raisonnable (4). Et ils s’y en allèrent. Il sortit encore sur la sixième et sur la neuvième heure du jour et fit la même chose (5). Et étant sorti sur la onzième heure, il en trouva d’autres qui se tenaient là sans rien faire, auxquels il dit : Pourquoi demeurez-vous là tout le long du jour sans travailler (6) ? Parce que, lui dirent-ils, personne ne nous a loués ; et il leur dit : Allez-vous-en aussi dans ma vigne, et je vous donnerai ce qui sera raisonnable (7). Le soir étant venu, le maître de la vigne dit à celui qui avait la charge de ses affaires : Appelez les ouvriers, et payez-leur leur journée en commençant depuis les premiers jusqu’aux derniers (8). Ceux donc qui n’avaient travaillé que depuis la onzième heure s’étant approchés, reçurent chacun un denier (9). Or, ceux qui avaient été loués les premiers venant à leur tour, croyaient qu’on leur donnerait davantage ; mais ils ne reçurent néanmoins que chacun un denier (10). Et après l’avoir reçu, ils murmuraient contre le père de famille (11), en disant : Ces derniers n’ont travaillé qu’une heure, et vous leur avez donné autant qu’à nous qui avons porté le poids du jour et de la chaleur (12). Mais il répondit à l’un d’eux : Mon ami, je ne vous fais point de tort. N’Êtes-vous pas convenu avec moi d’un denier (13) ? Emportez ce qui est à vous et allez-vous-en. Il me plaît de donner à ce dernier autant qu’à vous (14). Ne m’est-il pas permis de faire ce que je veux de ce qui est à moi ? ou faut-il que votre œil soit envieux et mauvais parce que je suis bon (15) ? Ainsi les derniers seront les premiers, et les premiers seront les derniers ; parce qu’il y en a beaucoup d’appelés mais peu d’élus (16) ».
3. Quel est, mes frères, le but de cette parabole ? Car il semble que la conclusion que Jésus-Christ en tire soit contraire à ce qu’il a dit d’abord. Son commencement montre que tous ces ouvriers reçoivent la même récompense, et non pas pie les uns soient chassés et que les autres occupent leur place. Et cependant Jésus-Christ dit le contraire et avant et après cette parabole : Les premiers », dit-il, « seront les derniers, et les derniers seront les premiers », c’est-à-dire qu’ils seront devant ceux qui auparavant étaient les premiers, parce que ceux-ci n’auront pas gardé leur rang et qu’ils seront devenus les derniers de tous. Ce qu’il confirme encore par cette parole : « Parce qu’il y en a beaucoup d’appelés, mais peu ci d’élus ». Et c’est ce qui donne un double sujet à ces premiers de s’affliger de leur malheur, et un double sujet aux autres de se réjouir de leur état. Cependant le corps de la parabole ne témoigne point cela, puisqu’elle ne dit autre chose sinon que les derniers seront égalés à ceux qui avaient beaucoup travaillé : « Vous leur avez », disent-ils eux-mêmes, « donné autant qu’à nous, qui avons porté le poids du jour et de la chaleur ».
Il faut donc tâcher d’abord de comprendre quel est le but de cette parabole, et lorsque nous l’aurons bien compris, nous éclaircirons aisément tous les autres doutes. Jésus-Christ entend par cette « vigne » les commandements de Dieu : Le « temps » d’y travailler est toute la vie présente. Ces « ouvriers » qui sont appelés à ces différentes heures, marquent ceux qui sont appelés dans les différents âges de leur vie. Tout cela est clair ; mais la difficulté est de savoir comment ces premiers, qui avaient fait beaucoup, s’étaient rendus agréables à Dieu et avaient souffert, avec courage tout le travail